Opinions & Humeurs: Il faut plus de Wow à YUL
Avant, prendre l’avion était une expérience en soi et un privilège. Aujourd’hui c’est une banale commodité, alors qu’une majorité de touristes veut être transportée en sécurité le moins cher possible du point A au point B. Même avec l’espace restreint, les écouteurs et la bouffe en suppléments. Les voyageurs veulent mettre leur argent là où ça compte vraiment dans les sources d’expériences véritables: les activités, les attractions, les repas, les bars, les achats locaux. L’hébergement, tout comme pour l’aérien, y goûte aussi: on ne veut plus payer une fortune, alors les nouveaux hôtels minimalistes et les AirBNB connaissent une croissance notable. On observe aussi que le marché de luxe, même si minoritaire en nombre de clients, lui aussi croît avec une orgie de services décadents à faire envier notre Reine Elizabeth.
En payant moins cher l’hébergement et le transport aérien, les gens voyagent de plus en plus. Il y a les compagnies aériennes régulières qui ont « toujours » existé à la Air Canada, les transporteurs de vols nolisés à la Air Transat et les transporteurs à rabais (Low Cost) tels les Ryanair en Europe ou les Southwest aux États-Unis. 28% du traffic aérien s’est fait par les transporteurs à rabais en 2016.
Mais le Québec (et le Canada) n’en profite pas, freinant ainsi notre croissance sur les marchés internationaux. Je suis convaincu qu’il s’agit de l’une des raisons majeures de notre retard à l’international. Certes, il y a maintenant (heureusement) la compagnie islandaise Wow depuis l’an dernier, qui dessert avec succès Montréal vers son hub de Reikjavik. J’ai toujours entendu dire, par le passé, que Montréal n’était pas New York ou Paris en terme de population suffisante pour soutenir ce type de vols. Qu’il ne fallait pas rêver en couleur... Mais ça fonctionne en Australie avec une population comparable, et la compagnie Wow démontre de toute évidence le contraire, et que pour une petite destination (Islande avec ses 350 000 habitants), un transporteur à rabais peut jouer le rôle du développeur majeur de son tourisme international tout en reliant des grands centres urbains d’Amérique et d’Europe.
Plusieurs raisons semblent expliquer ce retard au Québec, dont le contrôle d’Air Canada sur différents marchés et son influence indéniable sur des organismes tels qu’ADM, le niveau prohibitif de taxation des billets au Canada, les coûts parmi les plus élevés de droits d’atterrissage au monde et la limitation de l’actionnariat non canadien dans les compagnies aériennes canadiennes qui devrait, dans ce dernier cas, changer cette année, passant de 25% maximum à 49%.
On apprend par ailleurs que le groupe Air France/KLM, qui opère déjà en Europe les transporteurs à rabais Hop et Transavia, va lancer bientôt ce type de vols vers les États-Unis.
Alors, je suggère humblement que notre Alliance de l’Industrie touristique du Québec se penche sur la question suivante avec Tourisme Montréal: comment optimiser les arguments pour convaincre un ou deux autres transporteurs à rabais d’instaurer des liaisons aériennes internationales vers Montréal sur le modèle de Wow, mais avec Montréal comme hub cette fois-ci, et être proactifs pour les convaincre de venir s’y établir, ou alors pourquoi Transat, notre fleuron national aérien, ne s’y intéresserait pas?
Chronique : Opinions & Humeurs, Jean-Michel Perron
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