ENTREVUE - ÉAQ, la mère des associations sectorielles, par Jean-Michel Perron
Entrevue avec François G. Chevrier, celui qui déconstruit la blague « Prends-tu des vacances cette année? Non, je reste au Québec! »
François G. Chevrier est à la barre d’Événements Attractions Québec (ÉAQ) depuis bientôt 3 ans. « Lorsque j’étais à l’Alliance, je me demandais comment on allait continuer à livrer la promesse, être hautement compétitif dans notre offre touristique. Comme ÉAQ se remettait alors en question et que ses membres sont au cœur de notre tourisme, j’ai plongé dans ce beau terrain de jeux… », explique-t-il en entrevue à TourismExpress. « Les attractions et les événements sont le cœur de l’offre, le #1 en wow et en retombées économiques. Ils monétarisent l’expérience touristique, contrairement aux paysages… », poursuit-il.
On a revu l’offre de services de nos membres, trouvé l’équilibre entre nos secteurs (qui comptent 22 catégories d’organisations touristiques !) et surtout fait face à la COVID. « J’arrivais et on se disait alors: on fait quoi avec ça? On est passé de 25 employés à 10 et aujourd’hui, nous sommes 38… La crise nous a permis de renforcer la relation avec nos membres par des rencontres par petits groupes affinitaires et des groupes de discussion. L’offre de membership a grandement évoluée et s’offre maintenant par niveaux de services ou à la carte. »
Il faut ajouter également qu’ÉAQ s’est vu confier un rôle de mandataire pour codévelopper et opérer des programmes au nom du ministère du Tourisme, car l’avantage d’une association sectorielle, c’est sa proximité terrain, sa connaissance intime de la réalité touristique. On pense notamment au programme « Passeports Attraits ». Avec la COVID, le goût de rester au Québec s’est accéléré. « Vous connaissez la blague “Prends-tu des vacances? Non, je reste au Québec!”? Bien ça a changé… Des centaines d’entreprises ont alors appris à travailler ensemble. Le gouvernement a payé 40%, mais les visiteurs ont payé 60%… On a une recette qui fonctionne… », indique un brin nostalgique le directeur général, sachant que le programme n’est pas renouvelé puisqu’il s’est terminé en août 2021, représentant 369 000 passeports vendus parmi les 577 attractions participantes, avec près de 17 millions de dollars en remboursements aux entreprises de la part du MTO, pour environ 1,4 million d’entrées uniques d’une valeur totale de plus de 43 millions de dollars. Une piste qui lui semblait pourtant porteuse dans un contexte d’inflation qui impose des contraintes aux familles québécoises.
Source photo : evenementsattractions.quebec/nouvelles
Toutefois, ce programme d’urgence a soulevé la question fondamentale de l’efficacité numérique de nos entreprises et a mené à la naissance d’une autre initiative conjointe avec le gouvernement. Le programme actuel de virage numérique ouvert aux PMEs touristiques du Québec, comme le mentionnait TourismExpress en avril dernier lors de son lancement, est essentiel en tourisme. Il permet l’accès à des experts externes avec un rabais allant jusqu’à 80% sur leurs honoraires.
Un 3e programme est également en cours : la mobilité active et collective dans les festivals et événements.
Tourné vers demain, ÉAQ vient d’établir ses nouvelles stratégies pour les trois (3) prochaines années qui portent, entre autres, sur l’intelligence d’affaires, le positionnement avec l’importance stratégique de leurs secteurs d’activités et l’approche de bonification de la promotion intra Québec (3 millions de visiteurs sur le portail EAQ et 200 000 abonnés sur l’infolettre) avec des outils performants pour ÉAQ et ses membres...
QUESTIONS EN RAFALES POUR LE DG
- Qu’est-ce que tu aimes le plus faire dans ton poste actuel?
« Faire du terrain, consommer le produit et rencontrer les équipes … Ça aide à comprendre et à constater les enjeux; je ne suis pas un opérateur par mon expérience passée… Le contact, ça "ground" notre métier… »
- Qu’est-ce qui est le plus demandant?
« Stabiliser l’équipe. Le marché de la main-d’œuvre est « violent! » On a de meilleurs moyens qu’auparavant, mais on n’est pas encore dans une industrie ultracompétitive pour nos conditions de travail. Il faut être connecté sur le sens, et non sur la tâche… »
- Que faites-vous du télétravail?
« Nous étions déjà à 3 jours en télétravail avant la COVID… maintenant 1 jour en présentiel par semaine, en plus d’une journée par mois. Il est important pour nous que les équipiers puissent se voir pour nourrir la synergie et la créativité! »
- Tout le monde parle d’innovation (un de vos axes d’intervention), mais est-ce accessible à chacun ou il faut plutôt soutenir les vrais innovateurs qui vont ensuite percoler sur les autres? Et l’innovation n’est pas que technologique?
« Au sens large, l’idée c’est que l’offre touristique et les entreprises puissent se renouveler, et faire autrement... Comment regarder le produit différemment? On a des champions naturels, il faut les propulser... mais il manque de capital de risque ("un fonds d’audace!"). La culture d’innovation, c’est une vraie recette pour les PMEs, sur le comment tu pourrais voir autrement ton quotidien et prendre le temps de t’exposer aux pratiques différentes et faire des gestes couvrant ta gouvernance, ta gestion d’équipes et ton réseautage autrement… C’est sur ce volet qu’ÉAQ veut agir. »
- Pour la promotion à l’intra-Québec, comment concrètement voyez-vous cela dans le contexte, qu’en plus des ATR, l’Alliance a débuté sa promotion sur l’intra-Québec? Pourrait-on impacter plus fort en se regroupant?
« ÉAQ est partenaire de promotion de nombreuses entreprises et territoires depuis plus de 20 ans! Si à ce jour notre approche reste relativement traditionnelle et axée sur nos médias touristiques, on vise maintenant, avec la technologie, à mieux segmenter le data, pour ensuite mobiliser des partenaires plus ciblés (ex.: tourisme familial ou allophone)? Qu’est-ce qui fait qu’un visiteur potentiel peut réellement être influencé? Nous voulons une plateforme et une approche plus relationnelle que les médias de masse afin de consolider notre place de leader en promotion intra-Québec… »
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En conclusion, avec ses 3 dernières années à la direction de l’ÉAQ, Francois G. Chevrier confirme: « Je suis un amoureux du tourisme… je suis prêt à faire les actions requises pour faire progresser cette industrie. ÉAQ peut jouer un rôle dans cette approche… Quand tu agis en fonction de ça, avec une bonne communication, de grands choses peuvent arriver! »
Bref, on appelle ça du leadership.
Jean-Michel Perron
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