Martin Roy réaction à la Chronique: Opinions et Humeurs - Financement des festivals: donner l'heure juste

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Ah, ces festivals et événements ! Que serait l’actualité touristique sans eux ? Pas un mois sans qu’ici ou là, un journaliste ou un chroniqueur, même de TourismExpress, ne se fende d’une analyse voire d’une critique au sujet de leurs retombées économiques, des subventions qu’ils obtiennent ou du prix auquel ils vendent leurs hot-dogs. J’ai moi-même si souvent eu à rectifier tant de faits, à défaire tant de mythes que j’ai évalué la possibilité de mettre toutes mes réponses au presse-papier pour n’avoir désormais plus qu’à faire « copier-coller » lorsque nécessaire.

Dans « Financement public des festivals : nécessité, création d’une dépendance étatique ou saupoudrage de fonds publics », Jean-Michel Perron abordait à nouveau lundi, sur ce site, des thèmes récurrents, en tournant les coins si ronds qu’il en donne le tournis. Ce n’est pas en coiffant simplement un texte d’«Opinions & Humeurs» qu’on peut malmener les faits à ce point.

On commencera par noter le cliché voulant que, sans d’autres interventions, la majorité des nouveaux fonds annoncés récemment par la ministre du Tourisme, Julie Boulet, « iront dans les centres urbains ». C’est faire totalement abstraction du fait que la nouvelle mouture du Programme d’aide financière aux festivals et événements touristiques comporte désormais une bonification systématique de 10 % de la subvention calculée dans un premier temps pour tous les événements qui sont à l’extérieur de Montréal et de Québec. C’est faire fi du fait que cette bonification atteindra 20 % dans les régions éloignées, de l’Abitibi-Témiscamingue à la Gaspésie, en passant par la Côte-Nord. Ces mesures sont en lien direct avec l’annonce faite par le ministre des Finances, Carlos Leitao, en octobre, qui ajoutait des sommes pour « favoriser le tourisme en RÉGION, notamment par les festivals et événements ». À travers d’autres mesures du Programme, des événements de Montréal et de Québec pourront aussi aller chercher des fonds supplémentaires certes, mais conclure d’emblée que les régions seront négligées et n’auront pas une grande part du gâteau n’est rien de moins qu’une vieille rengaine.

S’agissant des retombées économiques, l’auteur poursuit allègrement dans l’inexactitude. Les événements voulant accéder au volet 1 du Programme, réservé à ceux qui ont un budget d’exploitation supérieur à 6 M$, auront à produire une étude d’impact, en respectant le guide élaboré pour les événements qui ont un budget d’exploitation supérieur à 3 M$. Soit. Mais voilà que l’auteur emprunte de nouveaux raccourcis.

De un, il est faux de dire qu’un événement, tel le Festival d’été de Québec, se verra amputé de 1 M$ en retombées économiques parce qu’il ne pourra comptabiliser le cachet d’un Paul McCartney puisqu’il y a longtemps que, dans les études du RÉMI, les cachets d’artistes étrangers sont exclus du calcul, tout comme les dépenses des visiteurs locaux et j’en passe.

De deux, il n’y a pas de lien direct entre les retombées économiques et la subvention accordée, dans la mesure où l’impact sera seulement l’un des quatre éléments qui seront évalués pour formuler un seul « indice de performance », aux côtés des jours de participation, de la proportion des jours de participation effectués par des touristes hors Québec et de l’indice d’attractivité du festival auprès des visiteurs.

Au RÉMI et ailleurs (ce qui inclut désormais le Grand Prix du Canada où une étude sérieuse a été dévoilée en 2016), il y a longtemps que les « balounes gonflées », pour reprendre les termes de M. Perron, ne sont visibles qu’au sens propre, à l’International de montgolfières de St-Jean-sur-Richelieu ou au Festival de montgolfières de Gatineau. 

Pour couronner le tout, on s’étonne de lire de graves accusations — gratuites — de favoritisme au sujet du volet 2 du programme qui est on ne peut plus normé et dont les critères (jours de participation faits par des excursionnistes, des touristes, proportion des revenus autonomes, des dépenses affectées à l’expérience client, achalandage total) sont connus et analysés au microscope. « Un p’tit 10 000 $ madame chose, mais oubliez pas de voter du bon bord », écrit l’auteur, comme si Duplessis lui-même faisait l’analyse des dossiers. Cette affirmation est non seulement regrettable, elle fait du tort à l’ensemble de l’industrie touristique et mériterait à elle seule des excuses.

Enfin, je ne pourrais passer sous silence les fleurs lancées au RÉMI « pour la redoutable efficacité de son lobbying ». Mais en lisant toutes les autres affirmations dans le texte, l’auteur prouve qu’il est impératif, pour l’industrie événementielle, de bien s’organiser afin de rectifier les faits et faire valoir, auprès de la population et des élus, le côté de la médaille qui est trop souvent occulté par des polémistes de son acabit.

Martin Roy
Président-directeur général
Regroupement des événements majeurs internationaux

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