INTÉRESSANT: Innover en RH en clarifiant le projet humain de l'entreprise
Le propre de l’être humain est de pouvoir faire preuve d’imagination, et d’être par ailleurs en capacité de partager le fruit de ses créations mentales avec ses pairs. Ceci au point qu'un collectif d'humains est alors susceptible dans certains cas de figure, d’aller jusqu’à apparenter cette fiction cognitive à une réalité physique.
Il en est ainsi du concept de «l’entreprise». En effet, d’aucuns vous diront par exemple qu’ils travaillent pour telle entreprise, d’autres qu’ils aimeraient travailler pour telle autre, etc. Pour autant, qu’est-ce qu’une «entreprise» à l’origine, si ce n’est une création imaginaire d’un ou plusieurs individus? Qu’est-ce qu’une «entreprise», si ce n’est une entité virtuelle dont l’objet est de caractériser et de «soutenir» l’activité professionnelle de son ou de ses créateurs?
En l’occurrence, l’entrepreneur imagine et crée initialement «son entreprise» dans l’optique que sa création fictive soit au service de ses ambitions, en support à la mise en oeuvre de ses idées, de son envie de proposer tel produit ou telle prestation, et que par ce biais il puisse potentiellement en tirer une source de revenus.
Dès lors, que cette entité imaginaire soit créée à l’origine par un individu seul, ou par plusieurs conjointement, elle l’est en tout état de cause initialement dans la perspective d’être à leur service. Et nous pouvons ainsi considérer que tant que des individus s’inscrivent dans l'approche fondatrice de coopérer et donc de «faire oeuvre ensemble», de «faire entreprise ensemble», le fruit de leur dynamique collective qu’est cette «entreprise», est alors par essence même à leur service.
Pour autant, il apparaît qu’à un moment ou un autre, il s’opère une inversion de perspective. Une inversion qui se met concrètement en place notamment par exemple à partir du moment où une personne est embauchée par le ou les fondateurs. Ceci, dans le sens où de par son statut de salarié, cet individu nouvellement embauché s’apparente alors au « premier humain» en posture de se mettre au service de «l’entreprise». L’auteur et conférencier Tony Gaskins caractérise d’ailleurs cet état de fait de façon relativement explicite : «Si vous ne construisez pas votre rêve, quelqu’un d’autre vous embauchera pour l’aider à construire les siens.»
Cela étant posé, un axe majeur d’innovation RH s’ouvre alors à nous, fondé sur :
- la prise de conscience de l’intérêt de dépasser l'approche utilitariste d'une «ressource humaine» au service de l’entreprise,
- et sur le repositionnement au coeur de la logique de pensée, de la notion même de «faire entreprise ensemble».
Et ceci, afin que l’entreprise reste ainsi dans son essence et fondamentalement dans la durée, «au service» des humains qui oeuvrent et coopèrent dans le cadre conceptuel qu’elle constitue.
Il convient d’ailleurs pour se faire, de garder à l’esprit que l’innovation en RH est une dynamique protéiforme susceptible d’être mise en oeuvre selon différentes perspectives. Elle peut en effet par exemple tout autant se matérialiser au travers d’une nouvelle proposition de service et de valeur RH auprès de ses parties prenantes, que relever d’un changement de posture, de positionnement, de manière de penser et d’agir de la fonction RH.
C’est ainsi dans cette optique d’innovation RH relevant d’un changement de paradigme, que le pivot proposé dans l’essai «Pour en finir avec les RH demain… le futur de la fonction est déjà là« s’inscrit. A savoir, passer d’une approche de «Gestion des Ressources Humaines» à celle de «People Success», centrée sur la notion de développement des réussites humaines, tant collectives qu’individuelles. Une démarche dont l’un des piliers consiste alors à innover en regard des pratiques actuelles, en commençant notamment par travailler collectivement à clarifier et à formaliser le «Projet Humain de l’entreprise». Et ceci au départ sur la base d’une simple question :
QUEL EST LE «PROJET HUMAIN» DE L’ENTREPRISE?
Afin de répondre à cette question, en vue de faire réellement du «Projet Humain» un élément structurant de la dynamique collective d'entreprise, il convient de l'appréhender comme relevant en tout premier lieu d’une vision et d’une ambition partagées, explicitées et formalisées.
S’agissant de la vision, celle-ci consiste à considérer chaque membre de l’entreprise comme étant en posture de «coopérateur», c’est à dire comme étant partie prenante et intégrante de l'oeuvre collective qu’est «l’entreprise commune». Et c’est dès lors sur cette base, qu'il s’agit de partager collectivement l'ambition du «Projet Humain, de faire ensemble entreprise commune». L’idée «d'entreprise» s’inscrivant de la sorte dans le sens de «ce que l’on entreprend ensemble», et dans une dynamique de la coopération et son sens premier de «faire oeuvre collective».
Dans cette perspective, le «Projet Humain d’Entreprise» a alors vocation à être décliné concrètement en différents principes et modalités de fonctionnement coopératif, de nature à permettre :
- A chacun et chacune, de mesurer la valeur de sa part contributive dans la dynamique de réussite l’entreprise,
- La reconnaissance collective effective des contributions individuelles à l’oeuvre commune,
- Un travail de fond et en continu portant sur les caractéristiques et les dimensions de mise en oeuvre de cette reconnaissance,
- La juste valorisation des contributions «coopératives».
En complément, le «Projet Humain» se doit par ailleurs d’être à la fois «sincère et désirable». Il gagne en ce sens à intégrer un principe de «co-contribution vertueuse». C’est à dire, une caractérisation des contributions effectives de «l’entreprise collective» au service des individus d’une part, en regard de leurs contributions individuelles à «l'oeuvre collective» d’autre part.
En pratique, ces contributions de «l’entreprise collective» à l’attention de ses «coopérateurs» peut alors relever notamment de deux dimensions :
- Des contributions répondant concrètement aux besoins individuels de sécurisation,
- et des contributions favorisant le développement et la réussite des individus.
Dès lors, le «Projet Humain d’entreprise» adresse alors également fondamentalement la question du développement du lien unissant les «coopérateurs» et de son renforcement dans le cadre de «l’entreprise collective». Il vise en d’autres termes à repositionner la notion de solidarité au coeur de la démarche «d’entreprise», dans le sens où il ne saurait en réalité y avoir «d’entreprise collective» sans véritable solidarité entre ses membres. Ceci induit donc de facto deux principes intriqués, qui sont :
- Le principe de la «connaissance et de la reconnaissance concrète des uns et des autres, par les uns et les autres» au sein du collectif et des collectifs qui composent «l’entreprise commune»,
- et celui, que «la perspective de chacun compte». Un principe qui implique alors pour chaque «coopérateur» de s’astreindre à chercher véritablement à comprendre l’autre.
Enfin, tout «construit collectif» étant naturellement amené à vivre et à évoluer dans la durée au gré des membres qui le rejoignent, de ceux qui le constituent, et de ceux qui le quittent, il s’agit alors de savoir considérer le «Projet Humain de l'entreprise collective» dans la perspective complémentaire de la prise en compte des «Projets Humains individuels».
Dans cette optique, le «Projet Humain d’entreprise» peut ainsi se fonder sur le principe pragmatique d’acceptation et de «soutien inconditionnel à la réussite» de chaque «cheminement individuel», et de son articulation dans le temps avec le «cheminement du collectif» qui «fait entreprise».
En conclusion, le «Projet Humain de l’entreprise» vise donc en soi à cadrer et orienter la considération faite aux coopérateurs qui font, l’espace d’un temps, «entreprise ensemble». Il permet de la sorte de garder à l’esprit que l'entreprise est avant toutes choses et ni plus ni moins qu'un moyen. Et en d’autres termes, que l’humain n’est en réalité pas au service de l’entreprise : c’est l’entreprise qui par nature est au service de l’humain.
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