Les fausses notes du REFRAIN

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Dans la foulée du rachat par evenko des festivals Fuego Fuego et Metro Metro, le Journal de Montréal a fait la part belle aux critiques de deux porte-parole du Regroupement des festivals régionaux artistiques indépendants (REFRAIN), en reproduisant aussi un tableau soi-disant confidentiel contenant de nombreuses erreurs provenant de l’organisation. Dans son édition de vendredi dernier, TourismExpress a référé cet article. Aujourd’hui, le Regroupement des événements majeurs internationaux tient à rectifier ici certains faits et à apporter d’importantes nuances au bénéfice de l’industrie touristique.

À commencer par la question des subventions qui, du côté du principal partenaire qu’est le ministère du Tourisme du Québec, sont octroyées en fonction de la performance touristique. Là-dessus, le président du REFRAIN fait erreur : ce n’est pas, comme il le prétend « plus ton festival est gros, plus tu en obtiens », mais plutôt « plus tu as un impact touristique, plus tu génères des retombées, plus tu es soutenu ».

On peut d’ailleurs se réjouir que certains fleurons, comme OSHEAGA, comptent deux tiers de festivaliers de l’extérieur du Québec parmi leur achalandage. Qu’un festival soit détenu par un Martien n’y changerait rien : si son entreprise est légalement constituée au Québec, il y aurait droit parce que c’est bon pour nos hôtels, nos restaurants, notre économie. Il serait d’ailleurs bienvenu de répéter l’expérience et de multiplier ses succès en affaires s’ils se transposent chaque fois en retombées tangibles pour la destination.

Charlotte Cardin, en tête d’affiche d’OSHEAGA deux fois depuis 2021/Crédit: Susan Moss

Dans son argumentaire, le REFRAIN omet de préciser que le ministère du Tourisme bonifie de 10  % à 20 % les subventions aux festivals régionaux, en lien avec leur localisation, en sus des calculs sur la performance touristique.

Il ne dit pas non plus que les festivals d’evenko ne sont pas soutenus par la SODEC, le CALQ et Patrimoine canadien. Ainsi, si les pointes de tarte ont rapetissé d’environ 40 % depuis quelques années à Patrimoine, comme on le déplore tous, ce n’est pas le fait de grands méchants loups, mais bien davantage parce que les bases budgétaires aux programmes sont les mêmes depuis Stephen Harper, en dépit de l’inflation et de la multiplication des événements. Au RÉMI, la priorité est bien davantage de régler ce problème de financement et d’améliorer les programmes gouvernementaux au bénéfice de tous les événements que d’antagoniser petits et grands festivals, chercher des boucs émissaires ou s’adonner à des guerres fratricides.

Aussi, si Live Nation est présente ici comme partout dans le monde, l’exception québécoise prévaut puisque l’actionnaire demeure minoritaire, ce qui n’est pas nécessairement le cas ailleurs. Il faut être de mauvaise foi pour ne pas reconnaitre que des festivals comme ceux d’evenko promeuvent fortement la culture québécoise, quand on pense aux présences récentes de Matt Lang et Andie Therio à LASSO, de Charlotte Cardin, Jonathan Roy, Alicia Moffet et j’en passe à OSHEAGA. Et que dire des autres événements gérés par Spectra, à commencer par les Francos de Montréal, plus important rendez-vous du genre au monde ? Ces subventions rendent la culture accessible au Québec, plus que bien d’autres.

Lisa Leblanc à la rencontre de milliers de Montréalais aux Francos/Crédit: Frédérique Ménard-Aubin

Quant à Juste pour rire, il faudrait prendre note que l’actionnariat du Groupe CH y est minoritaire. Au demeurant, il est inexact de dire qu’« evenko reçoit au total 35 M$ » en subventions chaque année — alors que tout le membership du RÉMI se partage moins de 50 M$, pour un chiffre d’affaires cumulé de quelque 250 M$.

Toujours au chapitre des faits, notons que, contrairement à celle du REFRAIN, la dernière étude de retombées économiques du RÉMI (faite avec la méthodologie exigée par le gouvernement du Québec) a été rendue publique et demeure accessible. Elle n’est pas le résultat d’une multiplication ou d’une projection. Elle révélait bien à l’époque, en 2018, des retombées de 290 M$ (valeur ajoutée au PIB), mais seulement pour 17 de ses membres, qui comptent au nombre de 28 — et non de 26 ou 31 comme le rapportent les articles et le tableau erroné. Il est permis de saluer, voire célébrer chacun de ces rendez-vous à succès devenus emblématiques et grandioses, comme on le fait au RÉMI.