Un réseau de distribution qui doit se réinventer…
Je me souviens de mon premier Rendez-Vous Canada (RVC) comme si c’était hier. C’était en 2001, à Toronto, du temps où je m’occupais des marchés internationaux pour VIA Rail Canada. Près de 2000 participants, dont les deux tiers environ étaient des destinations, attraits, hôtels et transporteurs venant des quatre coins du pays, et l’autre tiers, des acheteurs provenant des quatre coins du globe. C’était impressionnant!
Le Web commençait tout juste à transformer l’industrie, qui dépendait encore beaucoup des systèmes de distribution classique dans le monde du voyage. Grossistes et voyagistes internationaux. Réceptifs canadiens. Agences de voyages et inventaire distribué via les GDS tels que Sabre, Amadeus, Galileo ou Worldspan. Une chaîne d’intermédiaires dans un système de distribution convenu.
Dans cet environnement, les agences réceptives travaillaient avec les hôtels, les restaurants, les transporteurs et les attraits afin d’amener une clientèle internationale captive, moyennant une commission au passage. C’était le prix à payer pour obtenir cette clientèle qui ne serait jamais arrivée en direct, de toute manière.
L’événement Rendez-Vous Canada s’est tenu à Edmonton en mai 2024, après avoir eu lieu dans la ville de Québec pour son édition 2023.
La désintermédiation du réseau… et la pandémie!
Évidemment, les choses ont bien changé depuis cette époque, même si certains piliers demeurent. Le Web aura amené son lot de changement, notamment avec un accès à l’inventaire hôtelier en temps réel et les meilleurs tarifs disponibles (best available rates, ou BAR). Mais surtout, la pandémie a changé la donne, surtout hors des grands centres urbains où les taux d’occupation ont atteint des records grâce à la clientèle québécoise en 2020, 2021 et 2022.
Pour Annie Joyal, directrice des opérations et ventes groupes, chez Jonview Canada, le constat est clair : « le réseau de distribution n’est pas assez connu et valorisé par les hôteliers et la restauration. Les plaintes que l’on reçoit portent souvent à ce niveau – faible qualité des petits-déjeuners, par exemple. Certains hôteliers, des restaurants et des attraits majeurs n'avaient pas besoin de nous après la pandémie... et maintenant ils aimeraient bien revoir les groupes d'Européens, après nous avoir refusé de l'inventaire et des réservations pendant que tout allait bien! », se désole-t-elle.
« La chaine de distribution semble se briser au Québec. Et dans l'Ouest, on observe des situations très difficiles, poursuit-elle. Je te donne un exemple: on ne peut plus faire manger nos groupes dans le Vieux-Québec car les restaurants ne prennent plus de réservations de groupe! On doit aller en périphérie, ou alors ne pas inclure les repas, et on laisse les clients manger par eux-mêmes. »
Et l’économie difficile, quel impact?
« À RVC Edmonton en mai dernier, j'ai trouvé que l'ambiance était bonne et que le mood était meilleur que par le passé - on parlait beaucoup moins de pénurie de main d'oeuvre, notamment. Les prix en hausse? Certes, mais ça ne semble pas un frein. On peut même dire que pour le Québec, ça vient appuyer le niveau de qualité que l’on observe chez nos partenaires touristiques, et ça se vaut », selon Magalie Soughikan, directrice des ventes et développement des produits, chez Canada Découverte.
« La clientèle avec laquelle on travaille ne semble pas freinée par la situation économique actuelle, mais on observe une légère baisse pour l'Ouest canadien (mais pas pour le Québec) », nous dit-elle.
Un son de cloche différent de ce que Jonview observe sur ses marchés. « L'Ouest canadien semble revenir en force, on a énormément de demande sur la plupart des marchés. On développe de nouveaux forfaits, et de nouvelles prestations touristiques dans l'offre, des variations sur certains itinéraires, de la croisière, du train, etc. », selon Annie Joyal.
« On développe aussi de la business aux États-Unis en tant que réceptif, ce qui nous permet de faire autant de l’individuel que du groupe, et pouvoir combiner les destinations à l'échelle nord-américaine. Même chose au niveau du ski, sur lequel on se positionne davantage, autant sur l'Ouest américain que canadien », nous dit-elle.
Le réseau doit se renouveler… et amener une valeur ajoutée!
« L'accueil et le service à la québécoise sont des atouts indéniables qui viennent absorber une grande partie des craintes ou enjeux liés aux prix élevés lors des prestations touristiques sur place. Ça fait partie de notre ADN touristique! », selon Magalie Soughikan.
« Pendant et après la pandémie, on s'est rendu compte que les gens voulaient avoir des expériences de qualité, personnalisées. On doit leur apporter de la valeur ajoutée sinon les gens organisent leur voyage eux-mêmes. C’est notre raison d’être comme agence réceptive! », conclut-elle.
Du côté de Jonview Canada, une préoccupation se trouve également dans le renouvellement de la main d’œuvre. « Un prochain défi est celui du renouvellement de nos guides qui accompagnent nos groupes. Surtout sur les marchés étrangers - italien, espagnol, allemand. On veut renouveler nos guides avant que plusieurs ne partent à la retraite... La COVID nous a forcé à nous renouveler, ce qui est positif, car on doit trouver du monde, les former, et assurer la relève! », s’exclame-t-elle.
Rédigé par Frédéric Gonzalo, collaboration spéciale
Cet article fait partie d’une série de reportages sur les membres de l’association des Agences réceptives et forfaitistes du Québec (ARF-Québec) qui célèbre ses 15 années d’existence!
Nom de l’entreprise: Jonview Canada
Année de fondation: 1981
Créneaux sur lesquels ils sont actifs: B2B
Marchés de provenance de leur clientèle: Jonview est présent sur tous les marchés mondiaux, principalement sur: Royaume-Uni, Irlande, Allemagne, Suisse, Autriche, France, Martinique, Guadeloupe, Belgique, Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, États-Unis, Canada, Italie, Espagne, Portugal, Mexique, Brésil
Nom de l’entreprise: Canada Découvertes
Année de fondation: Créé en 2018, Canada Découverte est une division du groupe Les Promotions Zone, fondé en 2004
Créneau sur lequel ils sont actifs: B2B
Marchés de provenance de leur clientèle: Europe francophone
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