OPINION - Le nombre d’associations touristiques, par Denis Brochu, directeur général Tourisme Lanaudière
J’ai lu l'article de Sylvain Drouin publié lundi 3 février sur le nombre d’associations en tourisme. C’est une question qui mérite d’être posée, et je vous félicite d’oser l’aborder. Cependant, permettez-moi d’offrir un point de vue différent sur la question soulevée.
Bien qu’imparfaite, la structure associative mise en place au Québec pour soutenir la croissance de l’industrie touristique est un modèle unique qui mérite qu’on s’y attarde.
D’un point de vue externe, à l’échelle nationale, on peut effectivement avoir l’impression que le nombre de regroupements est trop élevé. Pourquoi une ATR par région? Pourquoi tant d’associations sectorielles? Cependant, lorsqu’on analyse la situation sur le terrain, dans chaque région et pour chaque secteur concerné, le regard change.
Je dirige une association touristique régionale depuis 14 ans. Avant cela, j’ai dirigé un regroupement touristique local et œuvré en développement touristique dans un Centre local de développement. Au fil des ans, j’ai constaté que l’arrimage entre les différents acteurs n’a pas toujours été optimal. Toutefois, j’ai aussi eu la chance d’être témoin et acteur de l’évolution remarquable de cette structure, qui a su transformer un réseau de regroupements relativement autonomes en un réseau collaboratif et complémentaire. Certes, tout n’est pas parfait, mais le progrès est indéniable.
Je ne peux parler pour toutes les régions, mais je peux témoigner de la réalité d’une région de taille moyenne comme Lanaudière, où j’ai la chance de travailler.
Le rôle régional des ATR
Prenons l’exemple de Lanaudière, bien que la même logique s’applique ailleurs. Cette région compte six MRC et plusieurs instances régionales (bureaux régionaux de nombreux ministères – sauf Tourisme –, organismes dédiés aux loisirs, à la culture, à l’agroalimentaire, à l’environnement, à d’autres industries, table des préfets, etc.). Chacune de ces instances joue, à certains moments, un rôle en lien avec l’industrie touristique.
L’ATR, en plus d’appuyer ses 450 membres dans leur développement, assure la cohésion de ces nombreux acteurs en portant une vision commune et en exerçant un leadership fort, aligné sur son expertise : le tourisme. Sans une association touristique régionale pour assurer cette cohésion, j’ose à peine imaginer la multitude d’actions qui seraient mises en place sans concertation. Le résultat ressemblerait probablement au rendu musical d’un orchestre sans chef.
Une collaboration interrégionale efficace
Lanaudière a tissé de nombreux liens avec d’autres régions et travaille continuellement à en créer de nouveaux. Voici quelques exemples :
Depuis plus de 15 ans, Lanaudière et la Mauricie unissent leurs forces à 100 % pour la promotion internationale et le développement du produit motoneige, tant au Québec qu’à l’international.
Lanaudière participe à plusieurs initiatives avec d’autres ATR, comme :
- La carte Avantage pour les professionnels du tourisme (avec Laval et Charlevoix, maintenant étendue à 14 ATR).
- Un projet favorisant le covoiturage à des fins touristiques (avec les Laurentides et la Montérégie).
- Un outil numérique complémentaire aux circuits existants (avec quatre autres régions). o La promotion du Chemin du Roy (avec la Mauricie et Québec).
Un réseau national structuré et complémentaire
La création de l’Alliance, par décision unanime et volontaire de toutes les ATR et ATS, a considérablement transformé le paysage touristique québécois. En plus d’avoir obtenu le mandat de promotion internationale du Québec confié par le MTO, ce regroupement assure un échange constant et une cohésion grandissante entre des acteurs nombreux, mais complémentaires.
Une association régionale comme la nôtre signe aussi des partenariats d’affaires avec plusieurs ATS, comme Kéroul, Aventure Écotourisme Québec, Événements Attractions Québec, Hôtellerie Québec, la Société des Économusées du Québec et l’Association des stations de ski du Québec. Elle collabore également avec des instances nationales, notamment les équipes du MTO.
L’objectif de ces partenariats est toujours le même : offrir le meilleur accompagnement possible aux entreprises touristiques, qu’elles soient établies ou en développement. Ce réseau d’accompagnement professionnel est, à mes yeux, exceptionnel et envié par plusieurs pays.
Un modèle évolutif et nécessaire
Je suis très fier de l’évolution du réseau associatif québécois. Il est principalement financé par l’industrie elle-même, qui a eu l’audace de s’auto-taxer pour se donner les moyens de ses ambitions. Cette taxe, administrée par Revenu Québec, garantit une gestion rigoureuse des fonds. Le réseau est aussi soutenu et reconnu par le gouvernement du Québec et collabore étroitement avec les équipes du MTO, assurant ainsi une complémentarité avec les actions de l’État.
Notre modèle n’est pas parfait. Il doit encore gagner en cohésion et continuer d’évoluer pour offrir un accompagnement optimal aux entreprises. Mais il demeure essentiel et constitue un atout incroyable pour la croissance durable de notre industrie touristique. Ne l’oublions pas : cette industrie est composée de milliers de PME réparties dans toutes les villes et villages du Québec. Aucune autre industrie n’a une telle profondeur géographique.
Un modèle à clarifier, mais à préserver
Faut-il simplifier la compréhension de ce réseau pour les entrepreneurs touristiques? Assurément. Toutefois, un modèle dans lequel un entrepreneur adhère normalement à deux réseaux (et non 10) collaborant ensemble – un régional et un sectoriel – me semble non seulement optimal, mais aussi essentiel.
Denis Brochu, Directeur général Tourisme Lanaudière
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