Michel Couturier – Un leader déterminé au service d’un secteur incontournable : le tourisme religieux et spirituel, par Pierre Bellerose

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Président du conseil d’administration de l’Association du tourisme religieux et spirituel du Québec depuis sa fondation, Michel Couturier a un parcours inspirant.

En effet, Michel a œuvré au sein du ministère du Tourisme du Québec durant plus d’une trentaine d’années et a occupé divers postes de direction. Je l’ai personnellement connu lorsqu’il était le directeur général du marketing au Ministère, poste qu’il a occupé durant plus de cinq ans. Son mandat consistait à faire la promotion du Québec sur les marchés domestique et international.

Depuis près de dix (10) ans, Michel est maintenant conseiller en développement et promotion du patrimoine religieux, principalement auprès deux 2 organismes liés à ce patrimoine, soit la cocathédrale Saint-Antoine-de-Padoue (Longueuil) et le regroupement Les Sanctuaires du fleuve. Au niveau associatif, en plus de sa présidence au CA de l’ATRSQ, Michel est impliqué comme membre du CA de l’Association des commerçants de la rue Saint-Charles (Longueuil) et membre du CA et du CE de Tourisme Montérégie.

Je l’ai rencontré sur la rue Saint-Charles, dans le Vieux-Longueuil, il y a quelques semaines.

Michel Couturier, votre cheminement de carrière où le tourisme tient une place majeure est inspirant. Qu’est-ce qui vous a amené à œuvrer en tourisme religieux et spirituel? Une épiphanie ou un long cheminement?

Je dirais plutôt un cheminement. Il faut savoir que j’ai été élevé dans une famille de culture catholique, comme bien d’autres, et j’ai même joué le rôle de l’Enfant-Jésus dans la crèche vivante de mon village natal de Sacré-Cœur, quelques mois après ma naissance. Plus tard, j’ai été « enfant de cœur » dans ma paroisse catholique, à Boucherville. Le culte était alors célébré en latin, une langue que je maîtrisais peu. Par la suite, j’ai toujours eu un certain attachement envers ce milieu.

Après ma carrière gouvernementale, je souhaitais demeurer actif et utile. L’occasion est apparue après une discussion avec le curé de la cocathédrale Saint-Antoine-de Padoue, qui recherchait une aide stratégique pour le marketing et le positionnement de cette institution de Longueuil. J’ai embarqué dans l’aventure et j’y suis encore.

 

Pourquoi s’intéresser au patrimoine/tourisme religieux au Québec?

On s’aperçoit, partout dans le monde, de l’importance et de la popularité du tourisme religieux, qui permet de faire un devoir de mémoire (de renouer avec le passé) en aidant notamment les jeunes générations à faire des liens entre le passé et aujourd’hui. On parle de plus de 300 millions de visites par an dans les sites religieux du monde. En comparaison, le nombre de passagers de croisières dans le monde était d’environ 26 millions en 2019. Au Québec, les chiffres sont impressionnants, puisqu’il y avait plus de 3 millions de visites, uniquement dans les 5 grands sanctuaires religieux nationaux.

Mais le tourisme religieux, ce ne sont pas seulement des chiffres. C’est aussi une façon de partir à la découverte de nombreux pans d’histoire peu connus, comme l’importance de plusieurs congrégations religieuses (d’ailleurs souvent féminines) dans la naissance et la construction du Québec depuis plus de 300 ans. Les expériences sont plus variées que les gens ne le croient! Au-delà des églises, on découvre aussi des personnages, des jardins, des sentiers de marche thématiques, des événements, de l’agrotourisme dans plusieurs abbayes, et plus encore!

De plus, les œuvres et les travaux des artisans et des artistes québécois avant la Deuxième Guerre mondiale ne se retrouvent pas principalement dans les musées, mais bien dans nos églises (qu’elles soient catholiques ou protestantes), et cela sur tout le territoire du Québec. Une richesse culturelle, artistique et historique unique! Et c’est sans compter, bien sûr, sur la vitalité de nos communautés autochtones, où la spiritualité est un élément significatif de leur culture et de leurs communautés.

 

Nous entendons souvent des informations difficiles lorsqu’on parle de patrimoine religieux : désaffection des fidèles, perte de repères envers nos traditions religieuses, églises qui doivent fermer, etc. Êtes-vous optimiste sur le devenir du patrimoine religieux chez nous?

On sait tous que la pratique religieuse chrétienne au Québec est fortement en baisse et que nos congrégations religieuses sont vieillissantes. Dans ce contexte, plusieurs églises et ensembles conventuels doivent vendre leurs patrimoines ou se convertir. Nous sommes en effet dans une phase de transition historique à ce niveau.

Mais plusieurs éléments de nos actifs du patrimoine religieux ont une vitalité surprenante. En fait, je classerais nos institutions les plus dynamiques en 4 catégories :

  1. Nos grands sanctuaires de pèlerinage qui continuent de recevoir beaucoup de visiteurs et dont plusieurs ont des projets de développement importants (on pense à l’Oratoire St-Joseph, à Sainte-Anne-de-Beaupré, au Cap-de-la-Madeleine et à l’Ermitage de Lac-Bouchette);
  2. Des institutions religieuses qui se retrouvent sur des routes ou dans des pôles touristiques;
  3. Certaines églises qui ont une valeur intrinsèque artistique et historique qui méritent notre attention. C’est ici qu’intervient le gouvernement du Québec, qui reconnait l’importance de ce patrimoine. Depuis 1995, le ministère de la Culture et des Communications a versé plus de 427 M$ au Conseil du patrimoine religieux du Québec pour financer la rénovation, la protection, la transmission et la mise en valeur du patrimoine culturel à caractère religieux. Ce n’est pas rien! Évidemment, des églises, des chemins de croix, des cimetières ou autres peuvent être situés dans des routes/pôles touristiques et être aussi d’intérêt patrimonial. Il y en a d’ailleurs plusieurs (ex. : la Basilique Notre-Dame de Montréal, l’Abbaye Saint-Benoît-du-Lac et beaucoup d’autres).
  4. Finalement, plusieurs communautés décident de prendre en charge leurs églises de quartiers ou de villages pour assurer le culte et la préservation. C’est le cas de plusieurs communautés culturelles de Montréal.

On compte plus de 250 attraits religieux touristiques d’importance au Québec et des dizaines de petits circuits et itinéraires. Mais même pour ces institutions religieuses plus favorisées; le travail demeure immense et les défis nombreux. Toutefois, il y a de nombreuses clientèles intéressées et le potentiel est réel.

Abbaye Saint-Benoît-du-Lac

 

C’est ici qu’entre en jeu le rôle et les actions de l’Association du patrimoine religieux et spirituel du Québec. Quel est son rôle et quelles sont les actions de l’Association aujourd’hui, et votre vision à moyen et à long terme?

L'Association du tourisme religieux et spirituel du Québec (ATRSQ) est un OBNL qui vise à promouvoir le patrimoine religieux et spirituel, à favoriser le développement économique et  à encourager la compréhension interculturelle et interreligieuse. Voici un résumé des principales actions de notre association :

  1. Nous mettons en œuvre des campagnes de promotion pour faire connaître nos membres, tels que les églises, les ensembles conventuels, les cimetières, les sanctuaires et les monastères. Nous utilisons nos plateformes numériques et nous sollicitons/recevons des influenceurs (médias, grossistes et autres) chez nos membres.
  2. Nous avons cocréé avec 4 régions touristiques (ATR) du Québec (Montérégie, Cantons-de-l’Est, Saguenay–Lac-Saint-Jean et Québec) des circuits touristiques thématiques permettant de découvrir le patrimoine religieux de manière approfondie. D’autres suivront bientôt.
  3. L'ATRSQ participe à des événements spéciaux, tels les Journées du patrimoine religieux, qui permettent en septembre de chaque année d'explorer et de vivre les différentes traditions spirituelles du Québec. L’association participe également à Bienvenue Québec et Rendez-vous Canada.
  4. L'association offre des programmes de sensibilisation et de formation pour les professionnels du tourisme, afin de les aider à mieux comprendre et à accueillir les visiteurs intéressés par le tourisme religieux et spirituel. Grâce au soutien du MTO, elle a développé un guide de mise en tourisme pour les gestionnaires de lieux à caractère religieux et spirituel. Elle encourage également la recherche et les études dans ce domaine.

 

Et à moyen terme?

Après le passage de la pandémie et les efforts dédiés à la structuration de l’offre, l’ATRSQ vise à résolument prendre un virage B2C afin de positionner le secteur au sein de l’industrie touristique, tout en maintenant ses efforts de soutien au développement de l’offre. Voici cinq des grandes priorités à moyen terme de notre association:

  • Fédérer plus d’offres (plus de membres) pour mieux représenter la diversité du milieu;
  • Consolider le partenariat avec les ATRs ce qui favorisera une meilleure synergie en matière d’adhésion et d’actions communes;
  • Faire évoluer sa stratégie de promotion pour prioriser la clientèle individuelle du marché québécois et des marchés limitrophes.
  • Déployer une proposition d’accompagnement/conseil en promotion, en complément du soutien/conseil en développement, afin d’aider les membres de façon concrète et tangible.
  • Actualiser une étude d’impact économique du secteur du tourisme religieux et spirituel au Québec.

De plus, l’un des grands objectifs stratégiques de l’ATRSQ demeure le développement d’un partenariat pluriannuel avec le ministère du Tourisme, un peu comme une association sectorielle. Le tourisme religieux est un secteur important avec ses caractéristiques, ses forces et ses fragilités propres, et surtout un potentiel qui mérite qu’on soutienne son développement afin de mieux faire connaître nos atouts aux visiteurs de notre destination.

 

Par Pierre Bellerose, consultant en développement des affaires et stratégies et cofondateur du MT Lab. Il a piloté la Table de concertation sur le tourisme religieux de Tourisme Montréal (2012-2019) et a été membre du CA de l’ATRSQ pendant 2 ans (2018-2020).


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