Démystifier l’utilisation des données numériques des voyageurs

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L’utilisation des données clients à l’échelle des territoires est un sujet qui suscite beaucoup d’intérêts, mais également des questionnements et réticences de la part des organisations de promotion ou de gestion des destinations. Chez TouriScope, nous nous intéressons de près à ce sujet.

Par leur rôle de leader, ces organisations touristiques sont particulièrement bien placées pour compiler et analyser les données sur les visiteurs actuels et potentiels de leur territoire. Mais de quoi parlons-nous vraiment ? Quels sont les défis entourant la gestion de ces données ? Voici quelques éléments de réflexion, ainsi que des exemples de bonnes pratiques très révélatrices du potentiel des données clients.

DE NOUVELLES FAÇONS DE COLLECTER LES DONNÉES CLIENTS

À l’échelle du pays, des provinces ou des régions, les destinations canadiennes collectent beaucoup de données pour mieux connaître leur clientèle. Jusqu’à récemment, il s’agissait essentiellement de sondages, de statistiques provenant des réseaux sociaux, infolettres et sites Web. Mais de nouvelles initiatives voient le jour afin d’obtenir un portrait plus précis du profil et du comportement de leurs visiteurs. Elles misent sur d’autres sources, dont :

  • Données des moteurs de recherche (ex. : Google Trends)
  • Données mobiles géolocalisées (fournisseurs de téléphonie tels que Roger, Telus)
  • Données de paiement (transactions Mastercard, Visa)

Le ministère du Tourisme du Québec s’intéresse également de plus près à ces données massives. Dans son nouveau Cadre d’intervention touristique 2021-2025, il affirme vouloir stimuler l’innovation en utilisant les mégadonnées pour comprendre les clientèles. Aux Assises du tourisme fin mai, il a dévoilé son outil Visitor View de Environics Analytics, utilisant les données cellulaires des visiteurs. Le ministère du Tourisme, du Patrimoine et de la Culture du Nouveau-Brunswick, utilise également cet outil.

La plateforme Environics Analytics agrège une multitude de bases de données externes pour profiler et segmenter les consommateurs. Pour la segmentation, ils offrent la solution PRIZM, qui se base sur les codes postaux des visiteurs. Il existe une version juste pour le Québec. Cela permet d’obtenir des « profils types » des visiteurs canadiens, notamment leurs comportements de loisirs et de voyage.

Source : PRIZM — Environics Analytics

La mutualisation des données est aussi un des engagements du MTO puisqu’en collaboration avec l’Alliance, il vise à bâtir une base de données clients unique à des fins de marketing relationnel et de connaissance de la clientèle.

AVANTAGES ET DÉFIS DE L’EXPLOITATION DES DONNÉES DANS LE TOURISME

Consacrer des efforts à exploiter les données clients crée des opportunités de collaboration entre l’organisation et son environnement externe (les parties prenantes), mais également à l’interne puisque cela force à casser les silos entre les départements. C’est ce que soulignait Nicholas Hall, fondateur du Digital Tourism Think Tank, lors d’un webinaire/groupe de discussion organisé conjointement avec le European Tourism Futures Institute.

Il y exposait également les trois principaux avantages d’utiliser les données en marketing : la facilitation, l’engagement et le ciblage.

Même si les destinations sont conscientes de ce que peuvent leur apporter les données clients, de nombreux freins les empêchent de passer à l’action et d’explorer d’autres avenues que celles déjà utilisées (mais souvent non satisfaisantes), notamment :

  • Manque de temps, de ressources et de compétences techniques
  • Coût d’achat des données élevé (voire très élevé !)
  • Réticence envers le partage des données entre les acteurs
  • Méconnaissance de la science des données et du processus de création de valeur
  • Frein technologique (dette technologique, systèmes de données non standardisés entre organisations, etc.)

Les deux derniers points m’ont été partagés par deux brillantes start-ups du MT Lab, Gradiant AI et Alpha Premium. J’ai eu la chance de donner une conférence avec eux à l’événement des Territoires connectés de la semaine numériQC pour démystifier la gestion des données clients dans les organisations touristiques.

UTILISER LES DONNÉES POUR PRÉDIRE LA REPRISE TOURISTIQUE

Depuis le début de la COVID, Destination Canada a développé une méthode analytique pour repérer, dans les comportements des consommateurs et de l’industrie, des signes permettant d’estimer où, quand et à quel rythme les voyages et le tourisme reprendront.

Le rapport, intitulé « Rapport sur les conséquences de la COVID-19 et la reprise des marchés », est mis à jour régulièrement. La diversité des sources de données permet d’obtenir un portrait assez précis et complet de la situation. Les estimations pour chaque province et marché cible se fondent sur :

  • Les dépenses par cartes de crédit et de débit au Canada, normalisées en fonction des données de Statistique Canada
  • Les données prospectives de réservation et d’annulation de billets aller-retour auprès d’agences de voyages agréées par l’IATA
  • Les requêtes comprenant des mots-clés liés aux voyages, aux attractions et aux événements sur Google (2020 versus 2019)
  • Les recherches et réservations d’hébergement sur une agence de voyages en ligne
  • Les réservations de vols vers le Canada
  • Le nombre de nouveaux cas de Covid dans chaque pays

UN CENTRE D’EXPERTISE EN TOURISME MISANT SUR LES DONNÉES

Lors du webinaire de DTTT, j’ai découvert le centre d’expertise en loisirs, tourisme et hôtellerie CELTH, aux Pays-Bas. En partenariat avec le Netherlands Board of Tourism & Conventions, ils ont créé le Data & Development Lab Destinatie Nederland. Leurs projets en utilisation des données sont très inspirants et dépassent le cadre de la connaissance client. Voici quelques exemples :

  • Carbon footprint of all types of travel to and from the Netherlands
  • Comparison tools for visitor management
  • Customer journey toolkit
  • Dashboard the State of destination the Netherlands
  • Day Visitor Data Development (activez le traducteur fr de Google)
  • Predictive models for insight into tourism pressures
  • Using GPS to track visitor behavior in tourism
  • Value of online sentiment data for tourism issues

PAR OÙ COMMENCER ?

Les destinations n’ont plus le choix d’utiliser davantage les données clients. Que ce soit pour rivaliser entre elles ou avec les géants du Web qui ont maintenant tous un pied dans le voyage (Google, Amazon). Pour cela, il est nécessaire d’avoir des compétences technologiques et en analyse de données à l’interne, mais je pense qu’il s’agit surtout d’être ouvert à toutes les opportunités et de s’intéresser au sujet (par de la veille, conférences, discussions avec des partenaires, etc.).

Les technologies sont de plus en plus accessibles, des solutions automatisées existent sur le marché, dont certaines sont dédiées aux DMO. Des firmes se spécialisent dans l’utilisation de ces données massives pour l’industrie touristique : Travel Appeal en Europe, Rove Marketing au Canada ou encore Arrivalist aux États-Unis.

L’industrie touristique commence à peine à entrevoir le potentiel des données massives. Bien sûr, les enjeux éthiques sont omniprésents et les zones grises sont nombreuses. Les projets d’utilisation des données devront avant tout reposer sur des normes garantissant la vie privée des personnes et la confidentialité de leurs données. Car le plus important est de maintenir une relation de confiance avec nos voyageurs!

Vous souhaitez en savoir plus sur le sujet ? J’ai eu la chance de faire une entrevue dans le podcast de La Boîte Blanche, consacré à l’utilisation des données dans tous les secteurs d’activités. J’y parle bien entendu de tourisme !

Si vous souhaitez échanger sur vos projets concernant la connaissance client ou tout simplement discuter de ce sujet, n’hésitez surtout pas à me contacter!

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Nominations

NOMINATIONS SEMAINE DU 19 AOÛT 2024

  • Brasserie 701 de l'Hôtel Place d'Armes – Aurore Rousseau
  • Groupe Germain – Montréal et Toronto – Paul de La Durantaye, Nicolas Lazarou et Jean-Philip Dupré
  • Palais des congrès de Montréal – Nicolas Joël
  • AQS – Catherine Rocheleau & Audrey Bouquot

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