État du tourisme international: les chiffres de la réalité ! par Jean-Michel Perron (mars 2019)
La firme IPK, LA référence mondiale pour les données sur le tourisme international, vient tout juste de dévoiler son impressionnant sondage annuel 2018 avec 60 pays couvrant 90% du volume de voyageurs internationaux. Une autre année exceptionnelle : 5,5% de croissance l’an passé en tourisme (versus 3,7% pour l’ensemble de l’économie mondiale) et une prévision de +4% en 2019.
En voici quelques éléments, parfois assez surprenants. Je me permets quelques commentaires.
- L’usage de l’internet comme source principale de renseignements en tourisme est passé de 46% en 2007 à 82% en 2018. Les sites les plus utilisés ? Les sites hôteliers (38%) et ceux de destinations (34%)…les sites de réservations (Expedia, Booking.com, etc.) ne récoltent que 22%. Je ne comprends pas alors la dépendance aussi élevée en 2019 des hôteliers envers les sites de réservations alors que ce sont eux qui sont les plus consultés du Web…Oui les gens veulent comparer les prix mais pourquoi ne réservent-ils pas plus sur les sites hôteliers ? Je présume que vos sites Web ne sont pas à la hauteur.
- Mais obtenir des renseignements en dehors d’Internet demeure crucial dont principalement les agences de voyages (34%) suivis des parents/amis (27%), des guides touristiques (13%) et les imprimés/TV/radio (9%). Selon Rolf Freitag, le CEO d’IPK, LA STRATÉGIE marketing en tourisme à adopter par les PMEs : combiner l’Internet (renseignements de base) et le « traditionnel » hors-ligne (là où se fait la recherche de renseignements en profondeur) pour provoquer la décision finale de réservation.
- Étonnant : seulement 20% des voyageurs internationaux ont utilisés les médias sociaux en 2018 comme source d’information. Les blogues de voyage ainsi que Facebook sont les plus importants alors qu’Instagram et You Tube sont marginaux ! Dire que de nombreux spécialistes du e-marketing touristique font sentir coupable nos PME touristiques de ne pas être assez présentes sur les médias sociaux et que sans un compte Instagram ou You Tube, on n’existe pas…. ET pire encore pour les médias sociaux : les voyageurs sont seulement 34% à faire confiance aux renseignements qui s’y trouvent versus 65% pour les médias traditionnels. Finalement, les gens ne sont pas si cons que ça ! Ce qui fait dire à des firmes de recherches spécialisées telles qu’Edelmann (Trust Barometer 2019) et Brand Trust que « …les médias sociaux sont moins pertinents pour faire croître sa notoriété ou influencer sur les décisions d’achat des voyageurs ». Ce n’est pas rien quand on voit les efforts en temps et les budgets publicitaires qu’on y engloutit actuellement.
- But du voyage
- Agrément (72%)
- Affaires (14%)
- Parents & amis (14%)
Dans l’agrément, les touristes sont répartis ainsi : 29% soleil-plage; 29% séjours urbains; 18% circuits; 8% « campagne et montagnes »; 3% croisières. Mais ce qui étonne, c’est le degré de croissance versus 2017 : séjours urbains +222%, croisières +78%, soleil+ 76%, circuits +27% et campagne/montagne +23%. Ainsi, comme cela est vrai depuis des décennies, ceci démontre le manque de crédibilité des sondages d’intention des touristes potentiels envers une destination telle que le Québec. La proportion de ceux qui disent prioriser les séjours en nature et en régions est élevée mais dans la réalité, cela se traduit en de faibles proportions. Il serait essentiel pour les régions du Québec de comprendre ce qui fait changer d’idées les touristes dans la réalité (manque de temps, coût du transport, etc.). Un spécialiste américain des sondages consommateurs m’avait dit un jour pourquoi il ne faut pas croire les sondages d’intention : « …dans les sondages sur l’épicerie des ménages américains par exemple, les parents nous disent vouloir acheter des céréales santé pour leurs enfants mais rendus à l’épicerie, ils continuent d’acheter des Froot Loops influencés par leurs jeunes et le prix… ».
Dans le segment « Affaires » on observe une baisse des voyages d’affaires « classiques » individuels : MICE +42%; Affaires classiques : -4% (baisse causée par les appels vidéos tel que par Skype). Et le sous-segment MICE se décline ainsi : 46% conférences/séminaires; 20% en salons/foires professionnels, 18% en voyage de motivation et 16% en congrès.
- Hébergement : les touristes vont à 60% en hôtellerie classique (+59% versus 2017) ; 25% en hôtellerie alternative (Air BnB…) (+72% versus 2017) et 15% (+5%) en « non-payant ». On observe une forte croissance des établissements 4 et 5 étoiles, une stagnation des 3*** et une baisse en 1* et 2** . Selon M. Freitag, la baisse des 1* et 2** n’est pas dû à une demande faible mais plutôt à l’absence d’investissements dans ces catégories ce qui fait qu’ils ne sont pas de bonne qualité. Il y a à son avis, une réelle opportunité à investir dans des 1* et 2** mais peu d’entrepreneurs le font sur la planète….
- Tourisme excessif (overtourim). Ce phénomène récent devient une tendance lourde en tourisme:
28% des visiteurs internationaux ont trouvé qu’il y avait trop de touristes à destination en 2018. 12% affirment que ça l’a gâché leurs vacances. 30% de plus qu’en 2017 ! Ils ne reviendront pas ces visiteurs vers cette destination… Les jeunes de moins de 35 ans sont 3 fois plus sensibles à ce phénomène que les 55 ans + et les Asiatiques plus que les autres touristes. Les villes les plus affectées par ordre d’impact négatif ? Xian, Bejing, Mexico City, Venise, Amsterdam, Moscou, St-Petersburg, Bangkok, Istambul, Florence et Rome.
Cette liste va rapidement s’allonger. La solution facile actuelle pour contrer le tourisme excessif : nouveaux frais d’accès pour visiter ces villes ou ces attraits. Ainsi: +3 euros en mai prochain pour Venise; Chichén Itza double ses frais d’entrée; au Rwanda, observer 1 heure les gorilles passe de quelques euros à 1 300 euros; observer les « lézards géants» de Komodo passe de 9 euros à 440 euros… On se dirige rapidement vers un tourisme accessible uniquement aux plus riches.
De plus, des fournisseurs de services ne parviennent plus à gérer ces volumes dont les transporteurs aériens européens ce qui nuit grandement à la qualité de l’expérience des voyageurs. L’aérien en Europe vit une crise causée par un volume excessif de vols, un manque d’appareils et des lacunes dans la gestion du trafic aérien.
Le Québec devrait utiliser dans son positionnement international cette nouvelle valeur ajoutée, à savoir qu’ici on ne se pile pas sur les pieds et que le côté humain du tourisme est omniprésent permettant encore des échanges véritables avec la « population locale ». Mais notez que nous ne sommes pas à l’abri du tourisme excessif. Le Vieux-Québec devrait s‘en préoccuper dès maintenant.
- Les pays qui croissent le plus (en millions de visiteurs internationaux 2018 vs 2017)
- #1 : Turquie (+ 8,5)
- #2 : États-Unis (+5,3)
- #3 : Égypte (+3,4)
- #4 : France (+3,2)
- #5 : Grèce (+2,9)
- #6 : Italie (+2,9)
- #7 : Thaïlande (+2,8)
- #8 : Japon (+2,6)
- #9 : Vietnam (+2,6)
- #10 : Allemagne (+2,5)
- La sécurité : un attribut essentiel pour les destinations. 28% des voyageurs internationaux en 2019 sélectionnent actuellement une destination basés en priorité sur ce critère. Et quelles sont les destinations « perçues » les plus sécuritaires ?
- Finlande
- Suisse
- Australie
- Danemark
- Norvège
- Canada
Un avantage certain (depuis toujours d’ailleurs) pour le Canada et le Québec. Il ne faut oublier de le traduire dans notre mise en marché internationale.
Les pays perçus comme plutôt dangereux en 2019:
- Qatar
- Afrique du Sud
- Russie
- Colombie
- Mexique
- États-Unis
Et les pires (certains ayant pourtant connu une forte croissance en 2018, probablement avec des marchés limitrophes) :
- Jordanie
- Tunisie
- Égypte
- Israël
- Turquie
Dans cet ordre d’idée, pour la 1ère fois à mon avis de l’histoire du terrorisme moderne, le leadership éclairée et la sincère compassion avec des actions concrètes anti-armes de la Première ministre Néo-Zélandaise suite à la tuerie de Christchurch combinés avec le soutien populaire et culturel (Maori) unique vont rendre la Nouvelle-Zélande une destination encore plus perçue comme sécuritaire et attrayante et ce, à court terme.
Jean-Michel Perron
PAR Conseils
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