L’Alliance s’affirme ! Position claire sur l’aérien international et le TGV, par Jean-Michel Perron

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Geneviève Cantin, le 25 septembre à Saint-Hyacinthe échangeant avec Jessy Baron, sous-ministre à Tourisme Québec.

Dans une communication inhabituelle (pour l’Alliance) effectuée par la nouvelle PDG Geneviève Cantin dans le cadre de la Grande Conférence Alliance du 25 septembre dernier, l’Alliance « recommande aux gouvernements d’être visionnaire » sur deux dossiers : Développer des liaisons aériennes directes avec les grands marchés internationaux en poursuivant et rehaussant les investissements conjoints avec les partenaires du milieu et prioriser un Train à Grande Vitesse (TGV) abordable pour le voyageur et qui utilisera des rails dédiés uniquement au transport des passagers. Elle en profite, avec conviction, pour souligner l’apport majeur du tourisme dans l’économie québécoise en entrevue au quotidien La Presse.

TourismExpress a rencontré Geneviève Cantin ainsi que Sébastien Benedict, Affaires publiques & communications de l’Alliance.

Nouvelles liaisons internationales directes

Selon Geneviève Cantin, « … avec la hausse des prix de notre tourisme, notre population limitée, la volonté de poursuivre à créer de la richesse par de l’argent neuf (marchés hors-Québec), il devient nécessaire d’élargir nos marchés en se rendant plus accessible tout en vantant notre taux de change avantageux. »

Elle a tout à fait raison, c’est pragmatique d’agir ainsi dans les prochaines années car dans une ère de multicrises planétaires incluant l’écart de la richesse, il faut miser sur les clientèles à revenus élevés pour assurer notre base économique du tourisme, mais il y a deux éléments à tenir en compte dans cette approche :

1. Quelles villes/pays à prioriser et sous quelles conditions de risques financiers les premières années pour y participer ? « Tout ça reste à déterminer, mais on a un historique à ce chapître, on ne part pas de zéro. »

2. Comme l’aérien est le talon d’Achille des GES en tourisme, comment minimiser notre empreinte carbone ? « Il faut favoriser les durées de séjours plus longues au lieu d’un nombre élevé de voyages par individu. » L’Alliance devrait considérer le modèle de Visit Norway qui sélectionne ses marchés internationaux en fonction d’un ratio qui combine l’empreinte carbone des vols avec leur niveau de dépenses en Norvège. De plus, avec notre énergie verte, pourquoi ne pas maximiser la production et l’usage des SAF par appareil (Sustainable Aviation Fuel) sur nos liaisons principales en attendant l’arrivée dans 15 ans de l’hydrogène ?

Choisir le TGV

« Comme la durée du trajet est le facteur déterminant, l’Alliance de l’Industrie Touristique prend une position claire pour le TGV et non pas le TGF (Train à Grande Fréquence »), moins coûteux à construire, mais beaucoup plus lent », indique Geneviève Cantin. « Avec un TGV de Toronto à Québec incluant des arrêts à Montréal, Laval, Trois-Rivières et Québec, l’impact positif avec les marchés de Toronto et d’Ottawa, sera significatif. »

Et la mobilité vers les autres régions ?

Nous augmentons les clientèles internationales arrivant par avion à Montréal ou Québec et par TGV de l’Ontario. Soit. Mais comment rendre ensuite nos autres régions accessibles ? Comment faire percoler une partie de ces visiteurs ailleurs au Québec ?

Le Québec n’a pas une stratégie de transport collectif interurbain (ex : réseau d’autocars interurbains à hydrogène ou mise en valeur des trains régionaux actuels) et nos villes, une stratégie locale de mobilité durable/en commun connecté aux autres modes de transports interurbains (avion, autocar, vélo…) et favorisant la marche (1 km), le vélo (10 km) et les microvéhicules (50 km ). La réalité d’aujourd’hui pour une majorité de nos concitoyens et de visiteurs internationaux arrivant au Québec par avion ou train, souhaitant se déplacer en région ? Loue ton auto solo ou faite du pouce !

La seule mesure en place est le programme d’accès aérien aux régions (PAAR) et un comité aviseur sur le transport régional. « Il y a 73 000 voyageurs qui ont bénéficié de ce programme entre 2022 et février 2024, principalement sur les Iles de la Madeleine, Sept-Îles et Fermont…. » précise Sébastien Bénédict « … après avoir injecté 38 $ M la 1ère année, 48 $ M en 23-24 et maintenant 9 $ M/année jusqu’en 2026-2027 ». Ce programme avec des billets à 500 $ vise des voyages personnels et non professionnels. Avec Sept-Îles et Fermont comme destinations principales qui n’ont qu’une faible connectivité locale avec les attraits touristiques, nous sommes en droit de sérieusement questionner le réel impact touristique de ce programme.

« Il faut se questionner également, entre autres, sur le coût des billets d’avion en région » poursuit Sébastien Benedict, « … entre autres sur les frais multiples qui s’additionne à la tarification de base, un Montréal-Rouyn, c’est 158 $, un Washington-Charlotte, c’est 73 $ », précise-t-il »

Certes, le comité aviseur doit se pencher sur comment rendre nos régions accessibles en aérien (intermodalité, capacité des appareils, coût des sièges et fréquence), mais devrait également s’assurer d’analyser toutes les options sur la table incluant le modèle de coopérative TREQ rejeté par l’ex-ministre Pierre Fitzgebbon ou le nolisement d’appareils sur certaines destinations. 

La bonne nouvelle dans tout ça ? La nouvelle PDG de l’Alliance réussit très bien son entrée médiatique assumant son rôle d’ambassadrice décomplexée du tourisme québécois, convaincante et convaincue. On en aura bien besoin avec tous les enjeux de notre secteur.

 

  

Jean-Michel Perron
PAR Conseils
Blogueur et bifurqueur