Chantal Lachance : magicienne de l’extrême

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Figurant au top-25 des femmes d’influence de Québec, Chantal Lachance copilote la destinée de Gestev depuis 21 ans. Ces kamikazes de l’événement ont remporté leur petite coupe du monde à eux en positionnant dorénavant les événements sportifs comme un véritable produit d’appel touristique. 

Amateurs de vélo, Patrice Drouin et Chantal Lachance ont la jeune vingtaine quand ils décident de se lancer en affaires et de prendre en main l’organisation des Championnats du monde de vélo de montagne. On est en 1992 et les deux complices ne se doutent pas qu’ils font ainsi leurs premiers pas vers les plus hauts sommets. « On faisait ce qu’on aimait, un point c’est tout. Pas de plan d’affaires, qu’une passion partagée : le sport comme art de vivre » résume la VP et directrice des opérations de Gestev. Avec sa formule clé en mains, l’événement connaît un tel succès, qu’on se les arrache. Chantal Lachance et son associé plient bagage et passent ensuite six mois par année à parcourir la planète à titre de consultants. 

Gestev, c’est aujourd’hui 42 employés à temps plein oeuvrant à l’organisation des plus importants événements sportifs – en extérieur –de calibre  international, de coupes du monde de vélo de montagne aux championnats mondiaux de ski de fond en passant par les Vélirium et les Snowboard Jamboree de ce monde.  Leur terrain de jeu?
« Québec et sa périphérie. Mais nous travaillons aussi sur des projets qui pourraient nous amener ailleurs », avoue celle qui planche actuellement sur le dossier de candidature de Montréal pour recevoir les X Games en 2014. 

L’événement comme produit d’appel

La signature Gestev?  « Notre talent réside dans notre capacité à sortir des sentiers battus, à proposer des endroits inusités et à réaliser l’impensable », croit Chantal Lachance, fière de reconnaître que la créativité est aujourd’hui la marque de commerce du Québec à l’étranger. 

 « Il y a 10 ans, les événements n’étaient pas reconnus comme des produits touristiques. C’était une pub dans un journal et ça s’arrêtait là. Avec le temps, les offices de tourisme et les municipalités ont commencé à les voir comme des véhicules intéressants », avoue Chantal Lachance. « Contrairement aux événements culturels, les événements sportifs n’attirent jamais 400 000 personnes sur le terrain. Mais l’aspect médiatique et la retransmission d’images à la télé et sur les réseaux sociaux en font désormais un outil de promotion exceptionnel ».

Vitrine internationale

La plupart des grands événements de Gestev sont retransmis dans plus de 125 pays avec 200 heures de télédiffusion et des milliards de téléspectateurs. « C’est une visibilité extraordinaire pour Québec. En plus de retransmettre la compétition partout sur la planète, nous réalisons des capsules touristiques sur Québec - insérées à l’intérieur des émissions - tout comme nous soignons les plans de caméras qui la mettent en valeur ».  

Chaque événement géré par Gestev permet d’accueillir entre 200 et 400 athlètes qui vivront la destination à son meilleur. « Ce qui les frappe d’abord et avant tout, c’est la proximité de la villégiature. Peu de ville au monde peuvent se targuer d’offrir des lieux de compétition à 20 minutes d’un centre-ville, si ce n’est en plein cœur de celui-ci ». À leur retour, les athlètes deviennent souvent les meilleurs ambassadeurs de la destination.

L’impact économique de ces événements n’est pas négligeable. « Outre l’impact médiatique, chaque édition du Red Bull Crashed Ice – à titre d’exemple – rapporte en moyenne 10 millions par année». Sur le terrain, on estime que plus de 45% des 120 000 spectateurs viennent de l’extérieur de Québec.

Les défis de l’hiver

Patrice Drouin et Chantal Lachance sont des amoureux de l’hiver. « Notre fun, c’est d’aller jouer dehors peu importe les conditions », avoue la sportive qui croit que vaincre les éléments, ça fait aussi partie des défis à relever. « L’une des éditions du Red Bull Crashed Ice a subi deux mégas tempêtes durant la semaine. On est allé jusqu’à installer des souffleuses sur le parcours, on a déneigé les trottoirs et les entrées des résidents du Vieux-Québec ». Durant la coupe du monde de surf des neiges, l’autoroute Laurentienne fut fermée pour la première fois en 30 ans. « On aurait pu se dire, pourquoi aujourd’hui? On a préféré escorter les athlètes avec la police et la souffleuse devant ». Tout est toujours une question d’attitude.

Chantal Lachance avoue se coller aux grands axes de développement  touristique déterminés par le Ministère et l’Office du tourisme. « Avec la nordicité comme fer de lance, on était plus déterminés que jamais à plancher sur des événements d’hiver. En lien avec la mise en valeur du fleuve Saint-Laurent, on a opté pour l’organisation de la Transat Québec/Saint-Malo et on gère la Baie de Beauport ». Opportuniste? « Mieux vaut ramer le vent dans le dos », rigole Chantal.

Les grands défis de l’industrie

Chantal Lachance est d’avis que le succès de l’industrie passe par une vision commune du Québec de demain et que chaque intervenant se doit de travailler dans le même sens, en respectant les créneaux définis par le ministère ou sa région.

« Avoir notre identité propre, le crier haut et fort et ensemble »

 « L’accessibilité demeure la pierre angulaire qui fera de nous une destination digne de ce nom. Il nous faudra rapidement plus de vols sur Québec tout comme il faudra continuer d’améliorer le transport en commun. On a tout à moins de vingt minutes, mais s’y rendre n’est pas une sinécure ».

L’environnement est aussi au cœur de ses préoccupations. « Nous détenons une certification du bureau de la normalisation du Québec et tentons depuis cinq ans de minimiser les impacts sociaux et environnementaux de nos événements en compensant nos gaz à effet de serre par exemple. Nous avons aussi créé un service clientèle 24h sur 24h pour répondre aux besoins des résidants que nos installations dérangent temporairement.

Il faut que le développement durable devienne une préoccupation constante de tous les joueurs de l’industrie. « Il faut être le peuple qu’on dit qu’on est, original, créatif et qui n’a pas peur d’oser ». En ce sens, Gestev aimerait aller chercher une coupe du monde de BMX à condition que la ville-hôte s’engage à créer une piste permanente qui resterait comme mobilier urbain de façon à ce que les jeunes puissent avoir un endroit où s’amuser, s’entraîner. Ils y travaillent depuis plus de 4 ans et leur rêve pourrait bien se réaliser en 2014.

Rédigé par Diane Laberge, collaboration spéciale