12 inspirations en tourisme durable au Québec, par Jean-Michel Perron

Tourisme durable · · Commenter

En quoi ces personnes et ces organisations participent à un nouveau tourisme.

Il y a deux semaines je vous parlais de destinations internationales inspirantes en durabilité, en nouveau tourisme. Aujourd’hui, regardons ce qui se fait ici au Québec. Je n’ai pas la prétention d’avoir fait l’inventaire exhaustif de ces individus et de ces entreprises touristiques fermement engagées dans une transition durable, mais ces 12 organisations/personnes sont définitivement inspirantes. Pour retrouver nos principaux leaders engagés en durabilité, les membres de la nouvelle organisation Tourisme Durable Québec — près de 200 — en constituent la base.

1. Monastère des Augustines : la poursuite d’une mission historique!

Dans le Vieux-Québec, un des grands leaders de la transition durable au Québec. Les dernières Augustines encore vivantes à Québec ont de quoi être fières. Premier hôpital en Amérique du Nord — l’hôtel Dieu — (1639), cet hôtel concept poursuit la mission vers une santé globale. Les actions en durabilité sont exhaustives et se déclinent dans la construction de l’hôtel dont la géothermie, la mission sociale incluant une tarification spéciale pour les proches aidants et les résidents de Québec et un restaurant priorisant les aliments locaux et biologiques.

2. Chic-Chac : comment le tourisme peut sauver une communauté !

Après la fermeture de la mine Gaspé Copper Mine en 1999 et sa fonderie en 2002, Murdochville, par référendum, les résidents votent pour la fermeture de la ville, mais en 2003, le gouvernement y installe un centre d’appels de la SAAQ. Surtout, c’est l’arrivée de Guillaume Molaison en 2008 et la création de son entreprise Chic-Chac de plein air (ski, événements, hébergement) qui transforme cette destination plein air dont la population double en hiver. Avec la pandémie, la migration de jeunes urbains s’est même accélérée...

Le tourisme, même en situation « mono industrielle » pour une communauté locale, est un secteur beaucoup moins fluctuant, fragile et dommageable pour l’environnement que le secteur des mines et de la forêt.

3. Sépaq : la continuité d’une approche durable!

Notre société d’État innove depuis des années vers des pratiques plus responsables, surtout qu’elle opère en pleine nature et se veut la gardienne de nos parcs et réserves naturelles. Seule organisation touristique à avoir un employé dédié à la transition durable à temps plein (et motivé/compétent : Hugues Sansregret). En plus de viser la production et l’utilisation d’énergies renouvelables et l’efficacité énergétique en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre, la Sépaq s’est engagée, dans son plan d’action 2016-2020 récemment bonifié, sur les axes suivants :

  • Renforcer la gouvernance du développement durable dans l’administration publique ;
  • Gérer les ressources naturelles de façon responsable et respectueuse de la biodiversité ;
  • Améliorer, par la prévention, la santé de la population ;
  • Assurer l’aménagement durable du territoire et soutenir le dynamisme des collectivités.

Notons également sa politique d’achats écoresponsables, ce qui représente en passant (nos achats d’équipements, de services et de biens) à titre d’entreprises touristiques, l’une des manières les plus efficaces de contribuer activement à changer le monde en participant ainsi à l’économie circulaire…

On anticipe de grosses annonces sous peu en durabilité, du côté de la Sépaq. À suivre.

4. Aurore Courtieux-Boinot, comment une vague transforme le monde de la restauration !

Plus de 400 restaurants et cafés au Québec goûtent à la passion durable d’Aurore. Cofondatrice de la Vague, l’organisme expert en solutions écoresponsables pour les cafés et restaurants au Québec, c’est elle derrière des initiatives très concrètes et efficaces de préservation de notre environnement : la Tasse consignée contre un petit 5 $, remboursable dans un réseau de commerces ; la Boite, une boite consignée pour des repas à emporter zéro déchet et le « programme à 25 cents » qui consiste à faire payer une charge perçue par les cafés participants, lorsque ces derniers distribuent une consommation dans un gobelet jetable. Plus efficace que le rabais, il s’agit d’un incitatif pour modifier les comportements et adopter la tasse réutilisable!

Surtout, elle distribue ses conseils pratiques visant le zéro déchet. Venez l’entendre le 23 février prochain sur l’heure du midi en Café-Jasette avec Tourisme Durable Québec.

5. Spa Eastman, précurseur du tourisme durable au Québec

En 1977, l’approche du Spa Eastman était certainement avant-gardiste, sinon carrément à contre-courant. Les économies d’eau et d’énergie, la recherche d’aliments naturels, les jardins biologiques, la non-utilisation d’herbicides et de pesticides, la création de compost...

Leurs pratiques durables actuelles :

  • Nous nous approvisionnons en suivant la règle des 3NJ (nu, non-loin, naturel et juste), c’est-à-dire que nous choisissons des produits avec le moins d’emballage possible, les moins transformés, les plus biologiques possibles et de préférence achetés localement ou régionalement auprès d’entreprises respectueuses de l’environnement et des êtres humains ;
  • Nous compostons depuis les tout débuts de l’entreprise, en 1977 ;
  • Nous approvisionnons plusieurs aliments de notre restaurant avec nos jardins, issus d’agriculture raisonnée ;
  • Nos clients peuvent choisir de ne pas changer leurs serviettes ou literies dans les chambres avec des indications claires. Ce geste nous permet de réduire la consommation d’eau et d’énergie ;
  • Nos sentiers ont été élaborés selon les normes de Forêt certifiée FSC (Forest Stewardship Council) depuis 2012. Ainsi, notre forêt nous procure de l’eau propre, purifie l’air, maintient la biodiversité, fournit un habitat pour les espèces et joue un rôle de premier plan pour atténuer l’impact des changements climatiques ;
  • Tous les papiers utilisés sont à base de papiers recyclés : papiers à main, papiers de toilette, mouchoirs, papiers d’imprimante ;
  • Limitateurs de débit d’eau (toilettes, robinets, pommes de douches) ;
  • Bouteilles rechargeables de savon biodégradable dans les chambres. Nous ne fournissons pas de petites bouteilles d’échantillons individuelles ;
  • Les serviettes abimées sont réutilisées en chiffons pour l’entretien ménager

6. Festival d’Été de Québec : les commanditaires exigent la durabilité

Comme pour les clientèles touristiques en général, ce ne sont pas les festivaliers ou les touristes individuels en général qui exigent des actions durables des entreprises touristiques, mais les clients corporatifs en tourisme d’affaires ou, dans ce cas-ci, des commanditaires tels que Rio Tinto ou Loto-Québec. Ceci étant dit, le FEQ applique depuis longtemps les bonnes actions d’une transition durable réussie :

7. Vaolo : l’entremetteur des expériences durables

Vaolo, dont le siège social est à Québec, est une plateforme collaborative d’innovation sociale qui vise à devenir la référence du voyage d’expériences hors des sentiers battus, à échelle humaine et à impacts locaux. Déjà dans 65 pays, la jeune entreprise dynamise plus de 1000 hébergements et offre plus de 4000 expériences thématiques sous le format de deux nuits et trois jours construites grâce à sa communauté de 150 000 personnes composée d’explorateurs et de voyageurs conscients.

En décembre dernier, Vaolo recueillait 5 M$ auprès d’investisseurs privés et publics. Nouvelle venue dans le paysage touristique en Europe, Vaolo vient d’acquérir l’entreprise française U2Guide qui a, depuis peu, élu domicile à l’Open Tourism Lab de Nîmes.

8. Îles-de-la-Madeleine : exemple d’une destination priorisant l’équilibre par la durabilité!

Tourisme Îles de la Madeleine a publié l’automne dernier sa stratégie touristique durable 2021-2026 pour assurer la pérennité de la destination avec 39 recommandations. L’archipel madelinot est la première destination québécoise à inclure la notion de durabilité dans tous les éléments d’une stratégie de développement touristique et a été le premier territoire à se doter d’une politique cadre de développement touristique durable au Québec dès 2006.

Il est certain que la fragilité physique des Îles, avec l’érosion rapide de ses berges et le risque réel de surtourisme ayant une capacité de support touristique limitée, se veulent des enjeux qui commandent des actions concrètes et rapides. De plus, les consultations visant à limiter le nombre de maisons locatives dénotent une préoccupation fondée et essentielle en regard de l’équilibre entre les résidents permanents et les visiteurs de courte durée qui induisent un risque de déséquilibre du tissu social, sans compter la disponibilité et la hausse des prix des maisons pour les Madelinots.

9. La Cale : le resto qui ne produit pas de déchets (ou presque)

La Cale est un resto de la rue Saint-Hubert à Montréal.

Il est impressionnant de voir l’approche globale du restaurant La Cale. Prenez le temps de voir la vidéo de Radio-Canada. Inspirant ! C’est la démonstration qu’on peut être durable et rentable. Qu’agir ainsi attire et fidélise les employés et que malgré les difficultés à trouver des fournisseurs de services eux-mêmes durables (aliments, boissons, huiles, etc.) ça n’empêche pas d’agir et de réussir.

De plus, avec leur approche de circularité (ex.: les tables sont faites à partir de palettes de bois) le restaurant est l’une des rares entreprises touristiques à s’inscrire très bien dans l’économie circulaire, une approche économique de la durabilité encore dans ses balbutiements au Québec, surtout en tourisme.

10. Joséfils et Anastasia : de ces générations d’individus conscients de l’importance des choses!

On connait tous des gens (surtout des grands-parents) qui, depuis leur naissance, appliquent les règles de base pour s’engager concrètement dans la durabilité : réduire sa consommation, réutiliser jusqu’à la corde (!), recycler afin de ne pas jeter, respecter l’environnement naturel. Joséfils Bellefleur (Nimushum = grand-papa) et sa douce (Nukum = grand-maman) ne parlent qu’en Innu, cette langue présente au Québec depuis au moins 8000 ans. Ils font partie de ces personnes proches de la nature et qui connaissent la valeur des choses. Ils sont des animateurs culturels de la communauté d’Unamen Shipu en Basse-Côte-Nord du Québec, sur le site touristique de l’Île Apinipehekat, récipiendaire d’une reconnaissance nationale en 2021 par Tourisme Autochtone Québec.

11. Le Baluchon : quand le respect de l’environnement naturel constitue une prémisse aux affaires

«  Nous croyons que nos gestes, nos activités et nos services ont une incidence sur les individus, sur les collectivités environnantes et sur l’économie tant régionale, nationale que mondiale. Notre image de marque et notre réputation sont rattachées à cette préoccupation environnementale. » - Extrait de la philosophie durable du Baluchon

En influençant par des actions concrètes toutes les parties prenantes de l’entreprise (employés, clients, résidents, partenaires), le Baluchon, situé en Mauricie, applique naturellement une approche durable et globale. Un véritable acteur du changement local et régional. Ce qui m’impressionne le plus avec cette entreprise, c’est le souci du détail et de mesures concrètes tel que garantir un médecin de famille à chacun de leurs employés.

12. Vallée-Bras-Du-Nord : redonner à sa communauté!

Vallée-Bras-du-Nord, c’est un parc où cohabitent des amateurs de plein air, des touristes, des résidents, des agriculteurs, des villégiateurs, des travailleurs forestiers, des entreprises touristiques et des organismes locaux. Cette cohabitation favorise un dialogue et une concertation véritables et continus afin de concilier les exigences économiques, sociales et environnementales.

À noter, leur approche systématique auprès de jeunes en réinsertion : les projets « En marche ». Voyez ici un témoignage vraiment touchant. Chaque année, la coopérative de la Vallée Bras-du-Nord embauche une dizaine de jeunes de la région de Portneuf traversant diverses problématiques de vie (décrochage, toxicomanie, délinquance, etc.), affectant leurs démarches d’insertion socioprofessionnelle. Durant près de 6 mois, ces jeunes sont intégrés à même les travaux de développement et d’entretien de sentiers (pédestres et de vélo de montagne). Depuis 2002, près de 230 jeunes sont passés dans ces projets.

Vous pratiquez sérieusement la durabilité et la circularité dans votre entreprise ou organisation? Vous pouvez être une source d’inspiration pour les autres? Faites-nous le savoir afin de partager vos actions à l’ensemble du Québec. Le tourisme durable, c’est aussi le partage!

Jean-Michel Perron
Bénévole à Tourisme durable Québec
Conseiller chez PAR Conseils 
Blogueur sur Tourte Voyageuse