« Tu protèges ce que tu connais », entretien avec Martin Soucy, PDG de la Sépaq, par Louis Rome
Une phrase qui résume bien notre entretien, car elle cadre autant avec l’approche et la vision du PDG de la Sépaq qu’avec la culture, et je dirais même la philosophie d’une organisation qui a à cœur la conservation et la découverte d’un de nos beaux patrimoines naturel et culturel.
De l’Alliance à la Sépaq
Depuis le 5 février 2024, Martin Soucy occupe le poste de PDG de la Sépaq. Il a une solide connaissance de l’organisation pour y avoir travaillé, autant sur le terrain qu’à la direction d’un parc et d’une réserve. Comme nous le savons tous, Martin a aussi été le premier PDG de l’histoire toute récente de l’Alliance, dans laquelle il a mis toute son énergie à bâtir l’organisation avec la collaboration des partenaires régionaux, associatifs et des entrepreneur(e)s. Cette expérience de 16 ans à la Sépaq, doublée de celle acquise de plus de 7 ans à l’Alliance où il a acquis une solide compréhension de l’ensemble de l’industrie touristique, l’a bien outillé pour son retour à la Sépaq comme PDG.
« Nos sites sont des produits d’appels importants pour les régions et en ce sens, nous devons nous rapprocher de nos partenaires dans l’avenir pour bien jouer ce rôle dans la mise en valeur de l’offre régionale pour accroître la durée des séjours et les retombées économiques. C’est une responsabilité aussi de partager notre expertise généreusement pour jouer un plus grand rôle de leader en tourisme durable »
La Sépaq en quelques chiffres
La Sépaq est une société d’État avec plus de 53 000 km2 de territoire à préserver, présente dans 14 régions administratives du Québec et sous la responsabilité de la ministre Isabelle Charest, ministre responsable du Sport, du Loisir et du Plein air.
La Sépaq est le seul réseau de territoire naturel et protégé de ce type dans le monde qui est majoritairement géré par des fonds autonomes. « C’est le choix qu’on a fait au Québec. La mission de conservation et d'éducation est financée parl le gouvernement du Québec avec environ 20-22% de nos revenus, tandis que 78-80% sont des revenus autonomes, qui proviennent de la clientèle (droit d’accès, etc.) Cette réalité nous pousse à être plus créatif, à prendre plus d’initiatives. »
C’est un patrimoine collectif de 2,6 milliards de $ d’actifs bâtis. « Grâce à un achalandage de plus de 9,4 millions de jours-visites, nous contribuons à la hauteur de 885,4 M$ au PIB du Québec, tout en générant 203,4 M$ en revenus fiscaux et parafiscaux pour le gouvernement du Québec (2023-2024). Avec près de 900 millions en retombées annuelles qui représentent environ 5% de notre PIB touristique, nous avons les capacités de faire bouger l’aiguille économique du tourisme régional par nos actions et activités, par notre capacité d’anticipation et de se projeter dans l’avenir. »
La Sépaq possède 46 sites, qui, sur 4 saisons, peuvent offrir des activités de découvertes, culturelles, des attractions touristiques, de la chasse et de la pêche, des activités éducatives et scolaires, des activités corporatives et événementielles, des séjours en camping et en villégiature et j’en passe.
- Parcs nationaux : 23 parcs nationaux québécois exploités par la Sépaq avec en plus le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent, exploité conjointement avec le gouvernement fédéral
- Réserves fauniques : Un réseau des 13 réserves fauniques auquel s’ajoute Sépaq Anticosti
- Établissements touristiques : 8 établissements, dont le Gîte du Mont-Albert, L'Auberge de montagne des Chics Chocs, l’Aquarium du Québec et la Station touristique Duchesnay.
La culture organisationnelle
La plus grande partie de l’entretien avec Martin Soucy a porté sur sa vision et la culture de l’organisation. Je lui laisse la parole.
« La Sépaq a une responsabilité sociétale : le bien-être collectif fait partie de l’essence même de la mission de la Sépaq. Nous assumons notre rôle de leader en expériences de nature tout en assurant notre devoir de protéger et de mettre en valeur le patrimoine qui nous est confié. Nous visons aussi à demeurer un moteur économique d’importance dans les régions où nous sommes présents », selon le site de la Sépaq.
À quoi ajoute le nouveau PDG « Je crois profondément à l’impact sociétal, environnemental et économique que la Sépaq a et doit continuer à avoir. Tout comme dans la transition de l'industrie vers un tourisme plus durable. Ce qui nous fait « tripper » en équipe, c’est de pouvoir contribuer à influencer les changements de comportements des citoyens pour plus d’engagements envers la nature, car nous avons les moyens et les outils pour contribuer à la transition durable du Québec. »
De plus, « on considère maintenant la fréquentation d’un lieu de nature, comme les parcs nationaux et les parcs régionaux comme un élément qui contribue à la santé de la population par l'activité physique. C’est une des manières dont la Sépaq intervient dans des enjeux sociaux au Québec. On touche donc, à la santé, à l’éducation via la découverte d’espaces exceptionnels, de par nos installations et de par nos activités. Tu protèges ce que tu connais. On touche aussi à la conservation de notre patrimoine naturel exceptionnel »
Des RH qui passent des ressources humaines à richesses humaines
« Notre grande force à la Sépaq c’est notre richesse humaine. C’est grâce à cette richesse de talents et d’expériences que la Sépaq réalise son mandat et qu’elle peut se projeter dans l’avenir en étant leader dans son champ d’expertise, tout en répondant aux attentes des Québécoises et Québécois, sans négliger les touristes toutes origines confondues. »
Des intrapreneurs
« La Sépaq ressemble à une fédération d’affaires, un peu comme l’Alliance, car il nous faut un sens de l’entrepreneuriat, on doit être des intrapreneurs. Ce sont nos directeurs et directrices de parcs, des réserves et des établissements touristiques et leurs équipes qui sont proches des clients qui sont les meilleurs pour trouver des solutions et pour les mettre en place à la grande satisfaction des clients. »
« Nous avons une obligation de performance comme société d’État, autant envers le gouvernement, qu'envers la population. On doit être plus efficient, car il y a plus d’exigence de la part de la population sur la qualité des services publics. » C’est on ne peut plus clair.
Planification stratégique et développement durable
Dix mois après son entrée en poste, Martin Soucy est en pleine planification stratégique. « On s’en vient avec un nouveau plan stratégique qui s’inscrit dans l’avenir, une forme de « game changer » Le plan a été coconstruit avec l’ensemble des équipes, du CA et en consultant nos partenaires. On a porté un regard aiguisé sur la contribution actuelle et future de la Sépaq pour le Québec, autant au niveau de la société en générale, qu’au travers d’enjeux sociaux, économiques, environnementaux et même en éducation et en santé par l'accès à la nature. » Bien curieux de lire le prochain plan en 2025.
Selon le plan de développement durable 2023-2028. « La Sépaq joue un rôle majeur dans la sauvegarde du patrimoine naturel québécois en recherchant une intégration des préoccupations environnementales, sociales et économiques dans sa mise en valeur et son accessibilité au bénéfice de la population du Québec et des générations futures ».
Martin Soucy ajoute « qu’à la Sépaq on développe des systèmes pour être plus efficace énergiquement parce qu’on veut diminuer le bilan carbone de nos opérations, on a une équipe en développement durable qui collabore avec toutes les autres équipes, dont celle sur les infrastructures. D’ailleurs, on est un des propriétaires de bâtiments avec énergie solaire parmi les plus importants du Québec. Pour la Sépaq, c’est au cœur de nos actions, de laisser la destination dans un meilleur état que tu l’as trouvée. » Tout a été dit!
Pourquoi ce retour ?
En conclusion, Martin termine avec ce qui explique son retour à ses premières amours : « Nous avons la chance d’avoir une nature et des territoires exceptionnels au Québec. Ce qui me motive c’est de pouvoir faire une différence en m’assurant, avec nos équipes, que la population, les touristes, mes enfants et les leurs éventuellement, en profitent pleinement et puissent en profiter pour de nombreuses générations à venir. C’est ce qui me motivent le plus quand je me lève chaque matin pour accomplir cette vocation qui est la mienne ! »
Notes historiques
Notes historiques
Création de la Sépaq
En 1977, le gouvernement du Québec se dote de la Loi sur les parcs lui donnant le pouvoir d'établir des parcs de conservation et de récréation, et ce n’est que le 20 mars 1985 que la Sépaq voit officiellement le jour.
L’expression « tenir un lac-à-l’épaule »
L’expression prend son origine dans le parc national de la Jacques-Cartier, suite à d’importantes rencontres qui se sont déroulées au pavillon du « lac à l'Épaule », dont deux ont marqué l’histoire.
Lors de la Deuxième Guerre mondiale, les chefs des forces alliées ont tenu deux conférences à Québec, dont une en août 1943. Désirant profiter d’une journée pour relaxer, le président des États-Unis, Franklin D. Roosevelt, et le premier ministre de la Grande-Bretagne, Winston Churchill, ont effectué un séjour de pêche, au pavillon du lac à l’Épaule.
Tandis qu’en septembre 1962, au début de la Révolution tranquille, le premier ministre Jean Lesage réunissait secrètement son cabinet, dont René Lévesque, alors ministre des Travaux publics et ministre des Ressources hydrauliques pour décider de la nationalisation de l’électricité via Hydro-Québec.
Louis Rome, collaborateur TourismExpress
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