Témoignage d’un hôtelier «tourisme durable» en Suisse - conférence ITB 2021, par Jean-Michel Perron

Hôtel Valsana à Arosa en Suisse

«  N’ayez pas peur et commencez à agir en durabilité », c’est le conseil que donnait aux autres hôteliers présents, Leo Maissen, le CEO de l’entreprise familiale en hôtellerie Tschuggen Hotel Group de Suisse lors du Congrès ITB de Berlin le 10 mars dernier. TourismExpress y participait et voici, après 10 ans de transition durable, où ils en sont dans la famille.

Tshuggen, c’est 4 hôtels en Suisse, tous « carbone neutre » (ayant réussi à réduire ses émissions de gaz carbonique [CO2] à zéro ou à compenser celles qui n’ont pu être réduites) depuis 2019 dont le plus récent (Valsana Hotel Arosa) construit en 2017 prioritairement sous des critères de durabilité; uniquement avec des matériaux durables suisses. Ils ont considérablement réduit les émissions de CO2 de tous leurs hôtels grâce à une construction durable, à une utilisation optimisée des ressources, à des partenariats locaux et à la formation et à la sensibilisation des employés sur la transition durable. Mais ils ne sont pas encore pour autant réellement «  carbone neutre », car pour les émissions de CO2 inévitables, ils compensent en finançant des projets de protection du climat « myclimate » en Suisse et au Rwanda.

Concrètement dans chacun des hôtels, la durabilité se traduit par :

1. Les clients ont la possibilité de compenser les émissions générées par leurs trajets vers et depuis les hôtels. Il existe quatre catégories et les prix correspondants : depuis la Suisse en voiture, depuis l’Europe en voiture, depuis l’Europe en avion et depuis l’étranger en avion ;
2. Transferts des clients arrivant en train
3. Bornes de recharge gratuites pour les véhicules électriques pour les clients
4. Service de navette
5. Chambres :
   1. Recyclage des capsules de café
   2. Recyclage des savons
   3. Appareils à basse consommation énergétique
6. Salles de bain et SPA :
   1. Réduction de l’utilisation de l’eau potable au moyen d’aérateurs dans les robinets
   2. Ligne de SPA 100 % bio de The Organic Pharmacy dans tous les Spas
7. Restaurants :
   1. Approvisionnement en aliments durables (viande d’animaux de plein air, opérations de pêche certifiées)
   2. Petit-déjeuner buffet avec spécialités régionales
   3. Minimisation des emballages alimentaires dans les buffets
   4. Les déchets de cuisine sont fournis aux producteurs de biogaz
   5. Pas de bouteilles en polyéthylène téréphtalate
8. Produits :
   1. Utilisation de producteurs et fournisseurs locaux
   2. Produits majoritairement suisses et produits animaux issus d’exploitations respectueuses des animaux et certifiées
9. Hôtels :
   1. Utilisation d’agents de nettoyage écocertifiés
   2. Utilisation de l’électricité produite exclusivement à partir de l’hydroélectricité alpine
   3. Séparation stricte des déchets et recyclage systématique de tous les matériaux
   4. Utilisation d’échangeurs de chaleur et de systèmes de récupération de chaleur pour la ventilation et les eaux usées
   5. Conversion en cours vers des systèmes techniques qui réduisent la consommation d’énergie
10. Communication :
    1. Communication interne et externe principalement sans papier
    2. Les brochures imprimées sont constituées de papier 100 % recyclé, blanchi sans chlore
    3. Organisation de sessions de formation régulières des employés sur diverses questions de durabilité

Une chambre de l’hôtel Valsana

Les principaux enjeux rencontrés par la famille ? Il faut au départ comprendre ce qu’est la durabilité, car c’est complexe. Il faut ensuite un changement de mentalité à tous les niveaux de l’organisation et des clientèles. La communication est donc un élément clé. Il faut innover et être à l’aise dans les « essais-erreurs » et enfin chacun de nos hôtels a son «  directeur de la durabilité ».   Notre première motivation était de réellement de sauver la planète, mais aujourd’hui nous avons des clients qui viennent chez nous parce que nous sommes durables, donc économiquement, c’est payant de le faire.

Notez qu’ils ont dans chacun de leurs 4 hôtels une chambre démo ouverte au public montrant chacun des éléments durables de l’entreprise…    «  On ne veut pas être des «preachers» de la durabilité, nos clients sont là pour relaxer et prendre du bon temps… »

Batterie à glace de l’hôtel Valsana

Dans leur hôtel le plus récent (Valsana), la famille Maissen a mis en place une « Batterie à glace » : L’ensemble du complexe Valsana est chauffé à l’aide de sondes géothermiques à 130 mètres dans le sol et en captant et en réutilisant la chaleur résiduelle d’autres appareils qui est généralement perdue dans l’environnement. Cette chaleur résiduelle est stockée dans un grand réservoir ou une batterie à glace, essentiellement un grand réservoir d’eau abritant un registre de tuyaux de 400 m de tuyaux de 1,5 m de haut. Les pompes à chaleur tirent leur énergie directement de ce réservoir de stockage où un mélange eau-glycol s’écoule à travers les tuyaux qui sont à leur tour connectés au circuit de la pompe à chaleur. Lorsque les pompes à chaleur extraient une grande quantité d’énergie, l’eau des tuyaux gèle pour former un bloc de glace. La chaleur résiduelle du système de récupération de chaleur est réinjectée dans le bassin d’eau pour dégeler la glace. Si plus de chaleur perdue est générée que d’énergie retirée, la glace fond et l’eau dans les circuits peut chauffer jusqu’à 15 °C. 

Pour Léo Maissen, il avoue candidement que c’est « très complexe », mais intéressant comme expérience ce système géothermique…

La semaine prochaine, nous parlerons d’un bel exemple durable également en hôtellerie, ici au Québec.

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Jean-Michel Perron
Invité par ITB Berlin — TourismExpress