Les OGDs (organisations de gestion de destination) à la croisée des chemins, par Pierre Bellerose

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Après la période éprouvante de la COVID-19, les OGDs (aussi ATRs, offices de tourisme, etc.) retrouvent depuis l’été 2022 des niveaux inattendus de volume touristiques et les présages pour 2023 sont très positifs malgré les difficultés économiques du moment. Sauf peut-être pour le tourisme corporatif, nous retrouverons en 2023 des volumes de touristes équivalents et même dans certains cas supérieurs à 2019. Nous ne vivons donc pas une révolution du voyage que certains craignaient (et que d’autres souhaitaient) mais plutôt une évolution accélérée de phénomènes qui pointait déjà il y a quelques années.

Mes observations, expériences, conférences et lectures récentes me permettent de proposer six grands défis actuels des organisations de gestion de destinations touristiques (OGD).

1. Le Mieux plutôt que le Plus

Les ambitions de pure croissance observées dans les plans stratégiques de plusieurs OGDs jusqu’à la fin des années de la décennie 2010 ne sont déjà plus au rendez-vous aujourd’hui. Dans ce monde post-COVID où les préoccupations locales et environnementales continuent de prendre de l’ascendant; l’heure est à la « croissante durable ». Donc, on ciblera de moins en moins une croissance tous azimuts, mais plutôt des marchés économiques porteurs plus circonscrits ou des niches pertinentes pour la région concernée. Les jours où toutes les destinations tentaient d’attirer chez elles de grands volumes d’autobus asiatiques, par exemple, sont derrière nous…

2. Priorité donnée à la durabilité

Les OGDs sont de plus en plus conscientes de leur impact sur l'environnement et cherchent à réduire leur empreinte. Elles cherchent à promouvoir le tourisme responsable en éduquant les touristes sur la culture et les pratiques locales tout en mettant en place des pratiques durables pour minimiser l'impact environnemental.

3. Utilisation de la technologie

Les organisations de gestion de destinations touristiques devront être plus enclines à considérer la technologie pour améliorer l'expérience des touristes. Les chatbots, la réalité augmentée et la réalité virtuelle sont des exemples de technologies qui peuvent être utilisées pour améliorer cette expérience. Une nouvelle vague d’attraits immersifs et les perspectives du métavers interpellent déjà les gestionnaires de territoire.

4. Collaboration avec les acteurs locaux

Les OGDs touristiques travailleront davantage avec les acteurs locaux (entreprises locales et population locale) pour créer des expériences authentiques qui reflètent la culture et l'histoire de la région. À l’heure de la mondialisation, les expériences locales et identitaires seront en grande demande.

5. Personnalisation de l'expérience touristique

Les gestionnaires d’OGDs cherchent à personnaliser l'expérience touristique en fonction des préférences des touristes. Ils peuvent utiliser les données et les outils de marketing numérique pour proposer des offres personnalisées et une expérience de voyage unique. Les possibilités de l’intelligence artificielle viendront bientôt interpeller les gestionnaires de ces organisations.

6. Redéfinir le rôle de l’accueil

L’accueil est la mission des OGDs (locales et régionales) qui connaît le plus de bouleversements liés aux changements d’habitudes de nos visiteurs et l’utilisation des technologies (lire les téléphones intelligents). Toutes les grandes traditions de gestes d’accueil des OGDs sont remises en cause (grands centres d’accueil physique, guides touristiques régionaux écrits, signalisation touristique, création et gestion de banques de données sur la destination).  À l’heure où chaque touriste transporte avec lui un téléphone qui lui permet l’accès à un nombre infini d’information ainsi qu’un outil performant d’orientation géolocalisé, comment rendre pertinentes les actions traditionnelles d’accueil des office de tourisme/OGDs? Quelles relations entreprendre avec les grands groupes mondialisés qui possèdent les applications (et les données) que la plupart de nos visiteurs utilisent?  Les réponses ne sont pas simples et l’heure est à d’importants questionnements stratégiques.

Plusieurs autres défis auraient pu être identifiés (dont celui des RH et de la transmission à l’écosystème de données liées à recherche et à l’intelligence d’affaires).  Mais les six que j’ai identifiés pour ce billet illustrent déjà à quel point les gestionnaires d’OGDs/offices de tourisme devront être à l’écoute des tendances, agiles, rassembleurs et stratégiques pour garder toutes leurs pertinences dans ce monde de grands et rapides changements post-COVID.

Par Pierre Bellerose, ancien VP de Tourisme Montréal, consultant en développement des affaires et tourisme, président des CA de M pour Montréal et d'Hub Montréal