Plaidoyer pour une filière Tourisme, par Marlène Fortin
Le 18 mars dernier, devant les gens d’affaires de la Chambre de commerce de Québec, Alain April, directeur général et copropriétaire de l’Hôtel Le Bonne-Entente est venu partager sa vision de l’hôtellerie au cœur du développement de la région de Québec.
Le tourisme, pas juste un divertissement, mais une force économique.
Avec 2,2 G $ de dépenses (il préfère parler de revenus) et 4,3 M de touristes tous marchés confondus, le tourisme à Québec n’est pas juste « une business de divertissement » : c’est une véritable force économique avec ses 1 780 entreprises (excluant la restauration), ses 38 341 emplois (2023), 1,5 G $ en salaires directs, 600 M $ en revenus de chambres, 26 M$ en revenus de taxes municipales par les établissements hôteliers et plus de 600 M$ en revenus fiscaux pour les gouvernements dans la région de Québec.
Cependant la disparité des taux d’occupation et des prix moyens entre l’ouest et le centre-ville permet de constater qu'il y a le secteur touristique Vieux-Québec et les autres.
Comparativement aux villes canadiennes (Montréal, Toronto, Ottawa, Calgary, Edmonton, Winnipeg, Halifax), Québec en 2024 se situe au 6e rang du taux d’occupation (66%), au 4e rang du tarif moyen par chambre (209$), au 4e rang des revenus d’hébergement tandis que le pourcentage de recouvrement depuis la Covid est à 98% (102% pour la moyenne canadienne).
Détenu presque à 100 % par des Québécois de souche, le parc hôtelier de la région est vieillissant. « Nous avons tous nos enjeux individuels de ressources humaines, de tarifs, de relève, d’hébergement illégal, etc. » Avec de telles performances « on devient achetable car rentable. » souligne Alain April. Pour le moment Québec est comme « un village gaulois ». On doit collectivement voir le vent de face des capitaux étrangers, qui comme à Montréal, Toronto et les autres grandes villes canadiennes, rachètent le parc hôtelier. »
Ne pas s’asseoir sur ses lauriers
C’est bien connu, Québec cumule les honneurs :
- 1er rang des meilleures destinations au Canada en 2024 (Travel + Leisure);
- 6e rang des meilleure destinations populaires au Canada en 2024 (Tripadvisor);
- 6e parmi les meilleures villes au monde pour sa scène culinaire et 5e parmi les villes les plus accueillantes au monde en 2023 (Condé Nast traveller UK);
- Meilleure destination croisière sur l’itinéraire Canada/Nouvelle-Angleterre en 2023 (porthole Cruise magasine USA).
Pour Alain April, une fois les récompenses obtenues « on s’assoie sur notre steak! ». Le danger de la complaisance comporte un risque à prendre nos succès pour acquis. Citant quelques icônes de la région de Québec, comme le Carnaval, le FEQ, Wendake, il s’interroge sur ce qu’on peut faire collectivement pour les aider à se développer davantage et s’imposer comme des incontournables de l’Amérique du Nord.
Abattre les silos, passer à l’action
« Il fallait de la vision et des gens comme Ross Gaudreault du port de Québec pour croire au développement des croisières internationales. Aujourd’hui Québec accueille 150 000 croisièristes. Il faut prioriser le développement des croisières en hiver. En somme il faut travailler sur nos acquis pour les renforcer, sans se développer en silo.» soutient Alain April
De plus « L’accessibilité à la ville est aussi importante que la mobilité dans la ville . Il a fallu des bâtisseurs et des visionnaires pour investir dans le développement de l’aéroport international Jean-Lesage. Il faut s’unir pour collectivement cibler des priorités et les développer. Il faut maintenant aider YQB à se développer avec des vols directs sur plusieurs années, supportés par la ville de Québec, l'ARHQ, Destination Québec cité, etc. »
Assumer nos ambitions et voir plus loin
L’Arabie saoudite fait du tourisme l’un de ces piliers économiques. Une dizaine de grands projets d’investissement sont dans les cartons du gouvernement d’ici 2030. Grâce aux incitatifs financiers accordés les jeunes entrepreneurs peuvent ainsi s’engager dans des projets privés.
« Si on comprend l’importance de générer du tourisme international, il faut s'asseoir la Ville, Destination Québec cité et le gouvernement pour aider le milieu en se dotant d’une vision sur 5 à 10 ans pour les différents pôles de la Ville » :
- Vieux Québec – miser sur le Château, le Carnaval, le FEQ, le centre de congrès, les croisières en hiver pour passer d’une à 20;
- Ouest et entrée de la ville : le plus gros développement économique doit se faire là mais il faut renforcer l’accessibilité et l’arrivée du TGV est l’occasion de repenser ce pôle. On a déjà l’Aquarium du Québec, l’Université Laval, le centre de glace et un parc hôtelier. « Il nous faut un casino, comme toutes les grandes destinations à travers le monde . »
- Dans la couronne nous avons deux centres de ski exceptionnels. Il faut travailler l’accessibilité et les aider à faire venir plus d’avions l’hiver ; il faut aider le Club Med à réussir et se développer encore davantage. La promenade Samuel-de- Champlain c’est un Wow. à Il faut la développer jusqu’à la Chute Montmorency pour que le secteur privé veuille investir dans des hôtels et des restaurants. Tourisme Wendake est aussi un Wow. Il faut les aider à se développer davantage. « Il ne faut pas juste saupoudrer de l’argent. »
EN CONCLUSION
Les différents paliers de gouvernement doivent s'impliquer dans le développement des attraits. Le secteur privé se chargera du développement économique. Alain April insiste sur l’amélioration de la qualité de vie des citoyens engendrée par l’industrie touristique. Alors que plusieurs secteurs sont vulnérables devant la guerre tarifaire, l’industrie touristique a su montrer sa résilience durant la Covid. Les gouvernements ont misé gros sur certaines filières aux retombées à venir. Le tourisme est une force économique aux retombées actuelles. « Le tourisme est un fer de lance économique incontournable pour la grande région de Québec. On ne doit pas le prendre pour acquis. On doit collectivement se donner un plan d’action quantifiable avec échéancier, en bonifiant nos attraits actuels et en développant 2 ou 3 nouveaux attraits majeurs. Pourquoi ne pas en faire une véritable filière? » soutient Alain April.
Marlène Fortin, Collaboratrice spéciale - TourismExpress
Services-conseils Tourisme - Culture
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