OPINION: Prenons soin de notre milieu touristique, par Samuel Grenier

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Tous les employés et les gestionnaires qui ont la chance de travailler dans le secteur touristique participent, chacun à leur manière, à la création d’expériences mémorables pour les visiteurs. Et, même lorsqu’on se retrouve à la place de ces derniers, on n’a pas à chercher loin dans ses souvenirs pour se rappeler de beaux moments vécus grâce au milieu touristique : un souper au restaurant partagé avec sa famille, l’émerveillement de son enfant qui voit un tigre pour la première fois, le sentiment exaltant de vivre avec ses amis un spectacle dans un festival, les beautés du fleuve St-Laurent appréciées lors d’une croisière, le confort d’un feu de foyer dans une chambre d’hôtel, l’excitation d’essayer un manège, ou encore l’apaisement trouvé en nature dans un parc du Québec.
 
Pour la majorité des autres secteurs, la pandémie a nécessité une adaptation aux mesures sanitaires. Pour le secteur touristique, la pandémie a affecté le cœur même de ses activités. Les fermetures à la suite des confinements et la capacité d’accueil limitée ont engendré une baisse drastique des revenus. N’ayant pas des marges bénéficiaires élevées comme le secteur des services ou le secteur industriel, les entreprises touristiques ont moins de possibilités devant elles pour assurer leur rentabilité, car elles continuent à payer des frais fixes élevés avec des revenus gravement amputés. À cela, il faut ajouter l’instabilité vécue par les employés et par les employeurs à la suite des confinements et des fermetures, une instabilité qui accentue davantage la pénurie de main-d’œuvre dans notre industrie. Encore aujourd’hui, le secteur touristique demeure le secteur le plus touché par les contraintes reliées à la COVID, il est le premier à être fermé et le dernier à être réouvert. En tant que société, quels sont nos choix, quelles sont nos priorités? Ne devrions-nous pas chercher à conserver cette qualité de vie que nous offrent les entreprises touristiques?
 
Le milieu touristique fait partie intégrante de notre vie sociale. Il offre des possibilités de divertissement et d’émerveillement ainsi que des activités d’apprentissage et de conscientisation. Le secteur touristique est source de richesse collective, non seulement par ses retombées économiques (16 milliards $ en 2019), mais également par son rehaussement de la qualité de vie des citoyens. Que serait la région des Laurentides sans ses stations de ski et ses parcs? Que serait la région des Cantons-de-l’Est sans ses vignobles, ses pistes cyclables et ses charmants villages? Que serait Montréal sans ses festivals et ses événements? Que serait une ville comme St-André de Kamouraska sans ses commerces locaux et ses artisans? Que seraient les quartiers Limoilou ou la Petite Bourgogne sans leurs restaurants et leurs microbrasseries? C’est tout le secteur touristique qui permet aux citoyens de profiter de leur milieu de vie, ce qui se reflète sur l’attractivité des villes et des régions et, ultimement, sur la valeur de leurs propriétés. 
 
En tant que gestionnaire travaillant dans le milieu touristique depuis le début de ma carrière et, aussi, personnellement, en tant que passionné de théâtre, d’art et de gastronomie, j’ai peur pour mon secteur; peur de voir fermer des attraits qui constituent des joyaux régionaux, peur de ne plus avoir la chance de partager à nouveau le parterre d’un festival, peur de ne plus pouvoir goûter à la cuisine de mon restaurant préféré, peur de perdre des collègues passionnés… Afin d’éviter ces fermetures, les autorités gouvernementales devraient cesser de confiner ce secteur. La grande majorité des contaminations à la COVID ont eu lieu au sein des milieux de travail (tous secteurs confondus), au sein des écoles et, surtout, via des rassemblements privés. Dès le début de cette pandémie, le secteur du tourisme, ses gestionnaires et ses employés ont appliqué avec rigueur toutes les mesures sanitaires demandées.
 
De plus, les autorités gouvernementales devraient augmenter les aides financières accordées aux entreprises qui continuent d’être touchées par la pandémie et par les décisions sanitaires, et ce, afin de diminuer leurs frais fixes, de compenser la perte de leurs revenus et d’assurer le lien d’emploi avec leurs employés. Il y a déjà plusieurs programmes en place qui aident les organisations touchées. Toutefois, il faudrait en faire encore plus comme l’ont fait certains pays européens avec davantage d’aides directes pour les entreprises. Dans une économie de libre marché, le contexte actuel déséquilibre totalement les forces des acteurs au détriment des entreprises touristiques qui se voient injustement désavantagées, ce qui menace leur pérennité.
 
En tant que citoyens, si nous souhaitons continuer à vivre des moments de bonheur et d’émerveillement et nous assurer de bénéficier de la richesse collective créée par le secteur touristique, prenons soin de ce milieu et de ses employés. En tant qu’acteurs de cette belle industrie, continuons nos efforts pour travailler ensemble à instaurer ce qui fait la force de notre industrie, notre passion qui brûle en chacun de nous ainsi que notre profonde humanité qui nous permettent de faire vivre joie et espoir.
 
Samuel Grenier
Directeur des Opérations du Zoo de Granby
Vice-président du conseil d’administration d’Événements Attractions Québec (ÉAQ)
Membre de l’exécutif du conseil d’administration du Conseil québécois en ressources humaines en tourisme (CQRHT)
Membre du conseil d’administration de Tourisme Cantons-de-l’Est