Méchante météo!
Propriétaires de campings et autres entrepreneurs touristiques pestent contre les prévisions. Les météorologues se défendent. Mais si c’était notre relation avec la météo qui pose problème ?
Le tour de la Gaspésie, c’est un classique du tourisme québécois. À partir de Sainte-Flavie, les visiteurs sont éblouis par les montagnes plongeant dans la mer, les hauts sommets dénudés des Chic-Chocs et les villages pittoresques. Mais de plus en plus de touristes partis faire le tour de la péninsule rebroussent chemin, parce que les bulletins météo annoncent des averses dans les prochains jours. Averses qui, dans bien des cas, ne viennent pas !
Dans toutes les régions du Québec, les propriétaires d’entreprises touristiques pestent devant l’alarmisme d’animateurs de radio, de présentateurs météo, de météorologues et de sites d’information québécois. Leurs prévisions sont, disent-ils, bien souvent déconnectées de la réalité.
« Les médias font du sensationnalisme avec la météo pour faire augmenter les cotes d’écoute. Avec l’arrivée du refroidissement éolien et de l’indice humidex dans le vocabulaire, on fait peur aux gens. La chaleur devient “accablante”, le froid devient “glacial”, un mélange de pluie et de vent se transforme en “bombe météo” », souligne Pierre-Paul Leduc, directeur général de la Société des attractions touristiques du Québec et de Festivals et événements Québec (SATQ-FEQ), deux organismes qui, ensemble, représentent plus de 500 membres.
Gilles Brien, ex-météorologue au ministère de l’Environnement du Canada aujourd’hui à la retraite, constate lui aussi qu’il y a une surenchère en matière de météo. « Chaque tempête devient un spectacle », dit-il.
Les médias ne mesurent pas l’effet négatif de leurs bulletins météo, déplore le milieu du tourisme. Selon une étude menée en 2014 par le tandem SATQ-FEQ auprès de 3 000 Québécois, lorsque le temps s’annonce peu clément, ils annulent ou reportent leurs activités extérieures dans 80 % des cas. « Quand on annonce 40 % de probabilité d’averses, les médias utilisent le pictogramme d’un nuage avec des gouttes de pluie. Or, cette probabilité signifie qu’il y a 60 % de chances qu’il ne pleuve pas. Alors pourquoi on ne nous annonce pas qu’il fera soleil ? » demande Christian Dufour, directeur du marketing de l’entreprise Les Sommets, qui regroupe cinq stations de ski, dont celle du mont Saint-Sauveur, au nord de Montréal, ainsi que le Parc aquatique Sommet Saint-Sauveur.
Les prévisions météorologiques trop pessimistes, les pictogrammes alarmistes et la moue des commentateurs à l’approche de nuages menaçants font perdre au parc aquatique 6 ou 7 jours sur une possibilité de « 15 jours de très haut achalandage », selon les estimations de Christian Dufour. Ces journées inutilement creuses font très mal à cette entreprise saisonnière.
Depuis plusieurs années, la SATQ-FEQ tente de sensibiliser les médias québécois aux répercussions de leurs bulletins météo. « Mais on ne sent pas vraiment d’ouverture de leur part », soutient Pierre-Paul Leduc.
Les sources d’information les plus populaires au Canada, qui donnent des prévisions d’un océan à l’autre, ce sont MétéoMédia et son pendant anglophone, The Weather Channel, propriétés de Pelmorex. Elles sont regardées par 11,1 millions de Canadiens par mois en moyenne. Et l’application touche deux millions d’utilisateurs, nombre en forte hausse. MétéoMédia se défend d’être alarmiste et de ne répandre que de mauvaises nouvelles. « Notre mission n’est pas d’encourager les gens à s’encabaner, mais de les préparer à la pluie, aux tempêtes de neige ou autres aléas météorologiques », explique André Monette, météorologue en chef à MétéoMédia. Le message du diffuseur, qui emploie une quarantaine de météorologues : si on prévoit de la pluie, faites votre activité en emportant un imperméable.
Source: L'actualité
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