Airbnb et ce qu’on peut faire dire aux chiffres

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Frédéric GonzaloLors d’une récente allocution que je donnais au Collège Lasalle, un membre de l’auditoire me questionnait au sujet de l’impact d’Airbnb sur les hôteliers. En fait, la question sous-jacente qu’on pouvait déceler était plutôt : quelle est la part de marché actuelle d’Airbnb dans la distribution en ligne de l’hébergement ? Or, la réponse à cette question dépend… surtout d’où vous puisez vos sources d’information!


Des chiffres contradictoires

Un récent sondage, effectué par Travelex aux États-Unis auprès de plus de 2,000 répondants, reflétant le plus récent recensement américain, nous apprend que seulement 4 % des Américains comptent utiliser Airbnb lors d’un prochain voyage! Voilà un chiffre anormalement bas compte tenu du buzz entourant la marque depuis sa création en 2008 et de la controverse autour de son modèle d’affaires, tant en Amérique du Nord qu’à l’international.

Toujours selon ce coup de sonde, le portrait est légèrement plus positif quand on analyse les intentions de voyages chez les jeunes professionnels de 25-34 ans, appelés Millenials. Seulement 8 % de ces derniers comptent utiliser Airbnb en 2016. On est toutefois très loin des résultats obtenus par la firme Rocket Fuel en 2015. Cette firme avait trouvé une forte proportion de voyageurs européens ayant utilisé les services d’Airbnb au courant de la dernière année avec 35 % des voyageurs en Espagne et en Allemagne, 34 % en France et en Italie, et près de 25 % au Royaume-Uni.

Même Carlson Wagonlit nous donne un écho différent, en mettant l’emphase sur les voyageurs d’affaires, affirmant que de 10 % d’entre eux ont déjà utilisé Airbnb, un chiffre qui monte à 21 % pour les jeunes professionnels.

Qui croire?

Le hic, c’est que l’on ne compare pas des pommes avec des pommes, tout simplement. Si le sondage de Rocket Fuel en Europe s’adressait à une clientèle de voyageurs (on suppose d’agrément), le coup de sonde de Travelex a été fait auprès d’un échantillon américain « représentatif du recensement », ce qui veut dire auprès de gens qui ne voyagent pas forcément, tant au niveau domestique qu’international. De son côté, Carlson Wagonlit s’est intéressé aux touristes d’affaires. Bref, les cibles de ces trois sondages ne sont pas les mêmes d’où la remise en question de l’interprétation que l’on donnerait aux chiffres en question.

Ceci étant dit, comme nous travaillons dans le domaine touristique, nous avons tendance à penser que tout le monde connaît Airbnb et voudra donc l’utiliser. Nous tendons ainsi à faire de la projection, alors que dans les faits il y a effectivement une minorité de gens qui l’utiliseront, optant pour des solutions (hôtellerie traditionnelle, hôtels boutiques, gîtes, hébergement spécialisé, etc.) classiques ou mieux connues, au lieu de se lancer vers l’inconnu ou une approche moins conventionnelle, comme Airbnb. Je pense donc que le chiffre de 4 % n’est pas si farfelu, mais que cette proportion est certainement plus élevée au sein de la population qui compte vraiment : les voyageurs. Est-ce de l’ordre du 20-30 %? On va attendre la prochaine étude sur le sujet, ce qui ne saurait tarder, j’en suis sûr… ☺

Source: Collaboration spéciale, Frédéric Gonzalo