À la base de son ADN, engagement et conviction. Robert Mercure, DG, par Louis Rome

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Je ne connaissais pas Robert Mercure. Le gars parle d’une voix posée malgré une feuille de route impressionnante. Dès le début de notre entretien je réalise que j’ai devant moi un homme engagé envers sa communauté, qui désire contribuer à l’essor du tourisme à Québec, au Québec, où croissance économique et développement d’un tourisme responsable et durable sont au rendez-vous. Retour sur un entretien avec un homme de conviction.

4e génération d’hôteliers

Arrière-grands-parents, grands-parents, parents, et voilà que le chemin était tracé pour une 4e génération d’hôteliers avec Robert. Comme il aime le dire, « il est né hôtelier », alors que dès son adolescence, il a travaillé dans les établissements de ses parents, de l’Hôtel Granby dans les Cantons-de-l’Est, au Flamingo hôtel à Cornwall en Ontario et enfin, à l’Arlington Inn à Potsdam, dans l’État de New York.

LR – Où as-tu commencé ta carrière?

RM – « Après avoir complété mon bac en économie et finance à l'Université de New Hampshire à Durham, j’ai véritablement débuté ma carrière professionnelle en hôtellerie à Boston en 1984, au ITT Sheraton, dans un programme réputé, que seul le Sheraton pouvait offrir à cette époque. »

Après avoir travaillé au Sheraton de Savannah et ensuite à Washington DC, il se lance dans la restauration en opérant pendant près de 8 ans un restaurant-bar dans le New Hampshire. Par la suite, il a travaillé à l'hôtel InterContinental de Montréal (95-99) comme directeur de la restauration.

LR – Ensuite, tu as fait le saut dans la grande famille des hôtels Fairmont

RM – « C’est en 1999, que j’ai commencé ma carrière de près de 20 années au sein de la marque Hôtels Fairmont. J’ai débuté au Fairmont Royal York de Toronto comme directeur de la restauration, ensuite les hôtels Fairmont m’ont offert un nouveau défi comme directeur de l’hôtel Fairmont Le Reine Elizabeth, où j’ai réalisé un projet de rénovation de plusieurs dizaines de millions.

C’est à ce moment que j’ai développé en quelque sorte une spécialité pour la rénovation, la restructuration et la mise en œuvre de nouveaux concepts en restauration et en congrès. J’aime laisser ma marque sur les organisations, j’aime prendre le pouls, regarder la situation stratégique, les tendances, etc. C’est comme faire un « reset ». On développe un plan ensemble, on stimule l’engagement et c’est un GO.

De 2005 à 2007, j’ai été directeur général du Fairmont Monte-Carlo à Monaco, où j’ai rénové l’hôtel au complet avec un budget de grande envergure. Aujourd’hui, l’hôtel est toujours classé parmi les plus grands hôtels de luxe d’Europe. »

LR – Pour quelles raisons es-tu revenu à Québec?

RM – « Je voulais revenir au Québec, pour deux raisons. J’étais à l’extérieur de la province depuis un bon bout de temps, mais je voulais aussi apporter ma contribution à la croissance du tourisme à Québec, au Québec. » La suite va lui donner raison.

À cela s’ajoute une troisième raison. « Je ne pouvais pas refuser le défi de la direction générale de l’hôtel le plus photographié du monde, Le Château Frontenac. Au programme, un projet de rénovation de grande envergure pour le rendre plus tendance, alors qu’à l’époque l’hôtel avait besoin d’un peu d’amour. » Tant qu’à faire, il en a profité pour revoir le positionnement stratégique de l’hôtel.

Ça a fonctionné car c’est à cette époque que lui et l'hôtel gagnent de nombreux prix, alors qu’il est élu hôtelier de l’année par l’Association hôtelière du Canada en 2015, tandis qu’en 2018, Le Château Frontenac est consacré le meilleur hôtel Fairmont dans le monde.

© Jeff Frenette Photography, Destination Québec cité

Un changement de cap avec un retour à Montréal

En 2018, il est approché pour occuper le poste de PDG du Palais des congrès de Montréal. À la tête du Palais, il y voyait l’opportunité de travailler avec son équipe pour un puissant outil de développement économique, autant pour Montréal que pour le Québec. Mais en 2019, la COVID frappe, alors que pendant plusieurs mois le Palais des congrès abrite un centre de vaccination. Cela n'a toutefois aucunement empêché Robert de réaliser des projets d’envergures, dont la mise en place d’une nouvelle image de marque pour supporter le changement de vision et de culture du Palais.

« On ne vend pas des pieds carrés! »

RM – « Pour moi le Palais n’était pas qu’un simple centre des congrès. On n’y vend pas des pieds carrés, mais plutôt des solutions. Il s’agit en quelque sorte d’un HOB d’innovation et de créativité pour les planificateurs d’événements qui souhaitent se réinventer à travers la créativité de Montréal. »

LR – En 2021, tu deviens le DG de Destination Québec cité, pourquoi?

RM – « J’avais toujours un condo dans le Vieux-Québec et je continuais à côtoyer les gens de Québec. C’est alors que j’ai été approché pour revenir à Québec. J’étais heureux de revenir à Québec, autant pour des raisons familiales que professionnelles. J’aime franchement la ville, et aussi parce que j’aime vendre, faire du marketing et du développement d’affaires. »

À son arrivée à Destination Québec cité (DQc), la pandémie avait laissé ses marques. « L’organisation avait besoin de faire évoluer sa vision. Notre prise de décision repose désormais sur l’intelligence d’affaires, ce qui nous permet de prendre de meilleures décisions. Par exemple, pour notre nouveau plan stratégique qui cible le tourisme responsable et durable et l’achalandage équilibré pour une prospérité à l’année longue. »

Le développement durable au cœur des priorités de DQc

Parfois on dirait que le développement durable n’est qu’une nouvelle marotte pour certains acteurs touristiques, question de rester dans le vent, mais quand le DG de la boîte ne cesse de parler avec conviction tout au long de notre entretien, de sa vision et de ses actions dans la matière, il est évident que le gars ne fait pas juste y croire, mais qu’il passe à l’action​.

Sa vision

RM – « On doit s’inspirer des meilleures pratiques en tourisme durable dans le monde. On n’a pas besoin de tout réinventer. Déjà, en mettant en œuvre les meilleures pratiques, ça nous rapproche d’un meilleur tourisme, d’un tourisme responsable aux bénéfices de l’ensemble de la société avec les trois pilliers du tourisme responsable – l’économie, l’environnement et le volet social. »

À la recherche d’un équilibre

Pour Robert, « il est essentiel d'équilibrer les saisons touristiques en répartissant dans le temps et l’espace les visiteurs sur l’ensemble du territoire de la région de Québec, tout en gérant le flux touristique afin de créer un équilibre entre les saisons et pour maximiser la prospérité économique ». Ce qu’il appelle l’achalandage équilibré des destinations.

Un exemple qui démontre la volonté de DQc de casser le cycle actuel de l’achalandage disproportionné entre la haute et les bases saisons. « C’est la première fois que nous investissons autant d’argent dans notre campagne marketing pour vendre l’hiver que pour vendre l’été. »

Son objectif avec l’achalandage équilibré « c’est de rendre les saisons moins cycliques. Ce qui ouvre des opportunités pour devenir la destination hivernale d’Amérique du Nord et du Québec grâce à notre offre diversifiée. On fait toujours du marketing l’été, mais dans ce cas notre regard est plus tourné vers le hors Québec. »

Un leadership collaboratif

Depuis son arrivée à Destination Québec cité, Robert a implanté une forme de leadership qui l’éloigne du management standard. « Je vois de belles opportunités au niveau du leadership collaboratif pour mieux maximiser la collaboration entre les acteurs sur notre territoire; les membres, la ville, les résidents, la communauté autochtone, etc. pour aller chercher de nouvelles synergies et ça fonctionnent au boutte. Ça va mieux depuis ce temps avec les résidents, surtout dans des secteurs à fort achalandage comme le Vieux-Québec. »

LR – Pourquoi avoir choisi le nom de Destination Québec cité? 

RM – « Je voulais changer le nom de l’Office du tourisme de Québec (OTQ) pour Destination Québec cité (DQc). Pour l’anecdote, lors d’un entretien avec le maire de l’époque, Régis Labeaume, je lui ai dit que les mots OFFICE et TOURISME ne vont vraiment vraiment pas ensemble et que même en France, le mot OFFICE est out. » Pour lui, le nouveau nom s’inscrivait dans la démarche déjà amorcée pour le changement de l'image de marque lancée en 2018: Québec cité, l'accent d'Amérique.

« L’ajout du mot cité à la fin de l’appellation de Destination Québec cité a pour but de mettre en relief l’agglomération et ce qu’est une véritablement cité, soit l’ensemble des composantes d’une région. » Le nouveau nom avait aussi comme but de faciliter la différenciation à l’international entre la province de Québec et la région touristique de Québec.

L’équipe de direction de Destination Québec cité. De gauche à droite: Julie Harvey, Philippe Caron, Véronique Desmarais, Robert Mercure, Marie-Pier Larochelle, Simon Marinier, Steve St-Charles

Une recherche permanente de l'équilibre

Quand Robert parle d’équilibre, il tient à souligner que la croissance économique ne doit pas se faire au détriment du développement durable, tout en ajoutant que le contraire est aussi vrai, d’où la recherche permanente d’un équilibre entre les deux visions. Il souligne aussi que nous ne devons pas oublier que le potentiel de croissance économique du Québec est immense, mais qu’il y a aussi de nos entreprises qui traversent une période difficile et délicate. Engagement, conviction et équilibre, que je vous disais.

 

Louis Rome, collaborateur TourismExpress


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